La crise de l’électricité en Afrique du Sud n’a cessé de s’aggraver depuis l’hiver dernier (mai-octobre), Eskom ayant décidé de passer aux niveaux supérieurs de délestages électriques après les nombreuses pannes qui ont plombé sa capacité de production.
Le passage au niveau 6 sur 8 des coupures de courant, appelés «load-shedding», est vécu par les citoyens et les entreprises comme un vrai cauchemar, suscitant colère et indignation dans un pays considéré comme l’un des plus industrialisés d’Afrique.
La pénurie d'énergie a ainsi lourdement pesé sur la confiance des investisseurs et la production des entreprises durant le 2ème trimestre de cette année, ce qui a causé une contraction de l'économie de 0,7 %, selon les chiffres de l’Agence sud-africaine des statistiques «Stats SA».
Le gouverneur de la Banque centrale, Lesetja Kganyago, a confié ainsi que la croissance de l'économie sud-africaine sera sérieusement ébranlée en 2022, le pays ayant éprouvé sa plus longue période de délestages électriques. Ses prévisions de croissance ont été revues à la baisse de 2,5 % à 1,9 %.
Pour l'analyste Dale McKinley, Eskom fait face à un problème structurel qui ne peut pas être traité à court terme. «La crise d’électricité est un héritage historique profondément enraciné. Le pays doit s’attendre à plus de délestages durant les prochaines années», a-t-il déploré.
M. McKinley a rappelé dans ce sens que l’origine du problème réside dans le parc de centrales électriques au charbon défaillantes à cause de manque d’entretien et d'investissements qui a duré pendant plus d’une décennie.
Il a relevé ainsi que la question est maintenant de savoir quand les producteurs d'électricité indépendants (IPP) entreront en ligne pour alléger le fardeau de la compagnie publique qui n’arrive pas à assurer un approvisionnement stable au pays
Dans ce sillage, les grandes métropoles sud-africaines ont engagé une course contre la montre pour trouver des alternatives à l’énergie fournie par Eskom. La ville de Johannesburg, cœur économique et financier du pays, a annoncé récemment son intention de lancer prochainement un cadre visant à assurer un approvisionnement en énergie auprès de producteurs d'électricité indépendants.
La ville du Cap, au sud-ouest du pays, a quant à elle déjà entamé son processus visant à diversifier ses sources d’approvisionnement en électricité, afin de réduire l’impact des délestages électriques sur la productivité économique et les ménages.
Dans cet esprit, les partis d'opposition ont appelé à un changement radical de politique pour sortir le pays de l’obscurité imposée par la compagnie publique en détresse.
L’Alliance démocratique (DA) a plaidé ainsi pour davantage d’investissements dans la production d'électricité privée et l'inclusion d'énergies renouvelables et de producteurs d'électricité indépendants dans le réseau pour combler l'écart entre l’offre et la demande.
Le chef du parti, John Steenhuisen, a averti que le pays faisait face à une situation "catastrophique" alors que le réseau électrique national n’arrive pas à garder les lumières allumées, ce qui, selon lui, constitue une conséquence directe de décennies de corruption et de mauvaise gestion.
Alors que le gouvernement sud-africain a annoncé plusieurs plans pour assurer un approvisionnement fiable au réseau électrique national, y compris à travers l’importation d’électricité de pays voisin, cette sombre réalité qui ponctue le quotidien du pays de Nelson Mandela semble être là pour durer longtemps.
Selon les experts sud-africains, un long chemin reste à parcourir pour mettre fin à cette crise qui paralyse le pays et compromet les efforts menés pour assurer la relance économique post-covid-19.