M. Bourita, qui a participé à la 1ère session du Dialogue International sur la Migration (IDM) de l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), tenue par visioconférence sous le thème "Accélérer l’action intégrée en faveur du développement durable: migration, environnement et changement climatique", a souligné que l’engagement du Maroc en matière de lutte contre le changement climatique est, ainsi, le pendant de son engagement sur la question de la migration.
Il a, dans ce sens, mis en avant la politique nationale migratoire, lancée par SM le Roi Mohammed VI et fondée sur des valeurs solidaires et humaines, l’Agenda Africain sur la Migration, présentée par le Souverain en 2018, en tant que Leader de l’Afrique sur la question de la migration, une vision phare ayant donné naissance à l’Observatoire Africain des Migrations, inauguré à Rabat en décembre 2020, ainsi que la Conférence Internationale de Marrakech de 2018, ayant adopté le Pacte Mondial.
Relevant que le discours sur les migrations ne peut plus se limiter aux migrants économiques et aux réfugiés, M. Bourita a indiqué qu’"il est une autre catégorie, grandissante, de migrants sur laquelle toute notre attention doit porter : celle des migrants climatiques".
"Les catastrophes naturelles et le réchauffement climatique sont, en effet, le principal déclencheur de nouveaux déplacements internes dans le monde", a-t-il insisté, ajoutant que "si la catégorie des migrants climatiques retient notre attention, ce n’est pas seulement parce qu’elle s’impose par son nombre qui pourrait atteindre 200 à 250 millions d’ici 2050, mais aussi parce qu’elle se distingue par sa complexité".
"Elle est difficile à quantifier avec précision, car elle s’appuie souvent sur des prédictions. Elle est difficile à qualifier conceptuellement, car elle brouille les frontières entre migrations forcées et volontaires -dont elle se situe à la lisière. Elle est issue de facteurs multiples qui imbriquent le changement climatique avec d’autres facteurs économiques, sociaux et politiques", a-t-il poursuivi, notant qu’il s’agit pour la plupart de déplacements internes ou de migrations régionales, car la migration internationale est souvent inaccessible pour les populations les plus vulnérables au changement climatique.
Evoquant la situation dans le Continent africain, M. Bourita a soutenu que l’Afrique, particulièrement impactée par le changement climatique, "est disproportionnellement touchée par le phénomène de la migration climatique et environnementale", citant à titre d’exemple la région du Sahel, qui demeure l’une des régions du monde les plus durement touchées par le changement climatique et qui est aujourd'hui l'épicentre de l'une des crises de déplacement à la croissance la plus rapide au monde, avec près de 1,6 million de déplacés internes et 365.000 réfugiés ayant fui la violence, dont plus de 640.000 en 2020.
"Le lien entre le changement climatique et la paix et la sécurité en Afrique n’est plus à démontrer. La hausse des températures a augmenté le risque de conflits de 11% en Afrique subsaharienne depuis 1980", a-t-il fait savoir, estimant que si cette tendance se poursuit, ce pourcentage pourrait atteindre 54% d'ici 2030, et coûter la vie à 394.000 personnes, notamment en raison du stress hydrique croissant et à la diminution des surfaces agricoles. Il a, dans ce sens, cité les Petits États insulaires en développement qui sont confrontés à des défis existentiels du fait des changements climatiques.
"Nous n’avons pas seulement la responsabilité d’agir, mais aussi le devoir de le faire rapidement pour juguler les déplacements liés aux dérèglements climatiques et mitiger les causes des catastrophes naturelles et la dégradation environnementale", a insisté M. Bourita, précisant que la conviction du Maroc est qu’une action urgente de la communauté internationale devrait être basée autour de 3 axes complémentaires, à savoir la protection des personnes déplacées ainsi que la facilitation des déplacements préventifs pour s'éloigner du danger et prévenir des déplacements massifs et brusques.
Il s’agit aussi de la lutte contre le changement climatique, en renforçant les politiques d’adaptation et de résilience, à travers notamment la Convention Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique (CCNUCC) et l’Accord de Paris, a-t-il dit.
Et le ministre d’enchaîner que ces 3 axes sont le prolongement de la doctrine dont le Maroc s’est imprégné, afin de lutter contre les effets néfastes des changements climatiques.
Ainsi, a-t-il précisé, en matière d’adaptation et d’atténuation du changement climatique, le Maroc est leader mondial, avec une NDC (Contribution déterminée au niveau national) ambitieuse de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 42% à l’horizon 2030, de même que le Royaume a considérablement augmenté la part des énergies renouvelables au cours des dix dernières années et est en voie d'atteindre l’objectif de 52% de capacités d'énergies renouvelables en 2030.
Au niveau régional, le Maroc, sous le leadership de SM le Roi Mohammed VI, a développé une forte solidarité climatique avec les pays de l’Afrique, a rappelé le ministre, en se référant en particulier à l’organisation du 1er Sommet Africain de l’action en faveur d’une co-émergence continentale, l’initiative "AAA"–Adaptation de l’Agriculture Africaine, l’initiative "3S" –Sustainability, Stability and Security– lancée conjointement par le Maroc et le Sénégal, qui propose des solutions innovantes à travers des alternatives à la migration forcée, et la Coalition sur l’accès à l’énergie durable ainsi que la plateforme African Youth Climate Hub.
M. Bourita a, par ailleurs, souligné que le Maroc, qui se réjouit de faire partie des pays Champions de la mise en œuvre du Pacte de Marrakech, propose de tenir, au courant de cette année, une réunion ministérielle des pays Champions qui, couronnée d’une Déclaration conjointe, viserait la promotion de ce Pacte et la sensibilisation pour la mise en œuvre pleine et effective de ses objectifs.
Il a, d’autre part, affirmé que la protection de l’environnement, la lutte contre les changements climatiques et la gestion de la migration ont cela de mutuel qu’elles partagent les mêmes dénominateurs communs, notant que ces enjeux structurels nécessitent tous une prise de conscience des défis collectifs, une volonté politique et un engagement sincère de tous les acteurs et une gestion basée sur les principes fondamentaux de la responsabilité partagée et du respect mutuel.
Le ministre a, dans ce sens, soutenu que la gestion des frontières ne peut faire l’objet d’une externalisation, estimant que les pays de transit n’ont ni la responsabilité d’être des gendarmes ni la vocation d’être des gardes-frontières.
De même, a-t-il poursuivi, la responsabilité en migration ne saurait faire l’objet d’un transfert, relevant que "transférer sa responsabilité c’est non seulement s’en défausser mais également vider de sa substance la logique même du partenariat. Un partenaire est un associé égalitaire, il n’est ni un bouc-émissaire, ni un adversaire".
"Les migrants ne doivent pas faire l’objet d’une instrumentalisation", a-t-il martelé, expliquant que "le chantage émotionnel et les conceptions binaires ne rendent pas service aux migrants".
"Rendre service aux migrants c’est, précisément le contraire. C’est refuser de se complaire dans le cynisme des politiques migratoires qui se résument au renforcement des frontières et à l’augmentation des déportations, du reste souvent sommaires. C’est, pour des politiques migratoires inclusives, envisager des voies de migration régulière, au risque, sinon, d’encourager elles-mêmes ce qu’elles prétendent combattre", a-t-il conclu.