Au cœur de cette lutte intestine, les sorties médiatiques tous azimuts de Mme Cheney contre les partisans du "Big Lie", le "grand mensonge" consistant à avancer que les élections de 2020 ont été "volées" à Donald Trump.
En février déjà, la fille de l’ancien vice-président Dick Cheney s’était attirée les foudres de ses collègues lorsqu’elle a voté, en compagnie de 9 autres députés républicains, en faveur de la procédure de destitution de M. Trump pour son rôle présumée dans l’incitation à l’assaut contre le Capitole le 6 janvier.
Cette position avait particulièrement agacé une aile de son parti, qui avait alors tenté de l’éjecter de son rang de numéro 3 à la Chambre, lors d’un vote en février, une procédure dont elle était sortie indemne.
Pour les chefs de file du parti républicain, soucieux de soigner leur image d’alliés indéfectible du très populaire Donald Trump, les prises de position régulières et très médiatisées de cette ténor du parti sont intolérables et risquent de leur coûter de précieuses voix l’an prochain alors qu’ils se démènent coûte que coûte pour reprendre la majorité au sein du Congrès.
La représentante du Wyoming a notamment suscité l’ire du chef de la minorité républicaine à la Chambre, Kevin McCarthy, qui a été enregistré à son insu par la presse déclarant avoir "assez" de Liz Cheney dont il ne faisait "plus confiance".
Dans son dernier discours public en tant que cheffe de file du GOP, Mme Cheney s'est attaquée à la "loyauté aveugle" du parti républicain envers l'ancien président et a déclaré que les affirmations sans fondement de Trump au sujet de la fraude électorale constitue une menace que "l'Amérique n'a jamais vue auparavant".
"Je vous promets qu'après aujourd'hui, je mènerai le combat pour ramener notre parti et notre nation aux principes conservateurs, pour vaincre le socialisme, pour défendre notre république, pour que le GOP soit à nouveau digne d'être le parti de Lincoln", a ajouté la députée résignée avant le vote devant sceller son sort.
A peine quinze minutes plus tard, l’affaire était bouclée. Les élus républicains se sont contentés d’un vote oral pour forcer le départ de la conservatrice du Wyoming.
"Vous ne pouvez pas avoir un président de conférence qui ressasse les arguments des démocrates", a expliqué, au terme du vote, le représentant de l’Ohio Jim Jordan, ancien chef du groupe conservateur House Freedom Caucus et un proche allié de Trump.
De son côté, le chef de la minorité Kevin McCarthy, a indiqué que les querelles de Mme Cheney avec l'ancien président étaient devenues une "distraction" et qu'elle ne devrait pas occuper un poste de direction où la mission est d'unifier le parti qui cherche à combattre le programme du président Biden et à reconquérir la Chambre l’an prochain.
Lâchée par les siens, Mme Cheney peut compter sur le soutien des démocrates, des alliés de circonstance.
"Il n'y a plus que deux partis : les patriotes et les traîtres", a notamment réagi le représentant démocrate Hakeem Jeffries, en référence à une citation du 18ème président des Etats-Unis, Ulysses S. Grant concernant la Guerre civile.
Cet épisode traduit l’écart grandissant entre, d’une part, une minorité de républicains désireux, selon elle, de restaurer le GOP à ses valeurs d’antan et à tourner la page Trump, et d’autre part, la majorité du parti qui estime que la loyauté au précédent locataire de la Maison Blanche est le seul moyen de remporter des sièges lors des prochaines échéances électorales.
Signe de cette division, plus de 100 républicains, dont certains anciens élus, s'apprêtent à publier cette semaine une lettre menaçant de former un troisième parti si le GOP ne rompe pas avec l’ancien président.
Liz Cheney, pour sa part, a promis, juste après sa destitution, qu’elle ferait tout pour garantir que l'ancien président "ne s'approche plus jamais du Bureau ovale".