Intervenant lors d'une rencontre scientifique internationale, organisée par la Fondation pour la Sauvegarde du Patrimoine Culturel de Rabat présidée par Son Altesse Royale la Princesse Lalla Hasnaa, ces experts ont considéré que la digitalisation du patrimoine culturel s'impose à tous les acteurs mondiaux de ce domaine, tout particulièrement dans le contexte de la pandémie du coronavirus qui a placé le patrimoine culturel face à des enjeux inédits, contraignant ainsi nombre d'institutions à prendre des initiatives visant la préservation de la communication avec le public par le biais de la technologie numérique.
Dans ce cadre, la directrice de l'Agence américaine de développement international (USAID), Rock Ashime, a salué l'initiative d'organiser cette rencontre, tout en louant les efforts des partenaires de l'agence qui accordent de l'importance à ce composant original de l'identité nationale.
Mme Ashime a également souligné que le contexte international actuel caractérisé par la propagation de la covid-19 constitue une grande opportunité pour se focaliser sur le patrimoine culturel et les moyens nécessaires à sa préservation, notamment à travers de nouveaux outils technologiques.
Le fait de s'arrêter sur l'importance du rôle de l'art et de la culture et sa capacité à renforcer la résistance et la solidarité des sociétés est parmi les leçons tirées de cette pandémie, a-t-elle fait remarquer, notant que l'USAID a soutenu, aux côtés de l'Ambassade des États-Unis au Maroc, plusieurs programmes visant la préservation du patrimoine culturel marocain.
Elle a, à cet égard, fait savoir que l'USAID soutient 11 projets dans plusieurs villes, dont Tanger et Al Hoceima, et contribue à la création de centres digitaux interactifs dans le Royaume, dont le Centre Interactif Digital (IDC Morocco), le premier du genre au Royaume lancé à l'Université Mohammed VI Polytechnique de Benguérir (UM6P).
Ce centre interactif, a-t-elle poursuivi, fournira une réalité virtuelle, une technologie réelle, des solutions ainsi que des produits renforçant la transformation digitale croissante des secteurs académiques, industriels et gouvernementaux au Maroc.
Pour sa part, Tarek Handeli, responsable au bureau culturel de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), a évoqué les divers avantages de la digitalisation du patrimoine culturel, notamment sa préservation face au trafic illégal, indiquant que la documentation et la digitalisation du patrimoine, en particulier les collections des musées et des artefacts précieux, facilitent le travail de l'Interpol dans la lutte contre ces pratiques au niveau mondial, et permettent de localiser les pièces volées ou importées illégalement.
La digitalisation, a-t-il ajouté, contribue à "la préservation des connaissances", rappelant dans ce cadre l'énorme incendie survenu au Musée national du Brésil en 2018, ayant détruit une grande partie de ses contenus qui n'ont pas été documentés ou digitalisés.
De son côté, le directeur de l'agence nationale du développement numérique, Mohamed Idrissi Meliani, a relevé que la transformation digitale touche plus ou moins à tous les secteurs et activités, soulignant que le domaine du patrimoine culturel fait partie, lui aussi, de cette dynamique.
Les recherches menées au niveau international durant les dernières décennies sur la valeur des sites archéologiques et culturels ont ouvert la voie à de nouvelles approches dans le domaine de "la compréhension, la protection et la valorisation de notre patrimoine culturel", a tenu à observer M. Meliani, faisant part des efforts déployés en ce sens par les institutions nationales, dont la Fondation pour la Sauvegarde du Patrimoine Culturel de Rabat.
Il a estimé qu'il s'agit d'un "chantier principal" visant d'une part, à garantir une durabilité du patrimoine culturel et d'autre part, à insuffler une nouvelle dynamique au système culturel du pays, outre le développement d'activités génératrices de revenus.
Le président de l'UM6P Hicham El Habti a, quant à lui, noté que la digitalisation du patrimoine culturel est un outil de partage des connaissances, arguant que ce patrimoine, matériel ou immatériel, constitue un élément central de l'identité nationale.
Il a également souligné que l'université a adhéré à plusieurs initiatives visant la préservation du patrimoine national immatériel, à travers la digitalisation du folklore et de la musique traditionnelle "Aita", en plus de la collecte et la digitalisation des archives de l'OCP, le projet de "la promotion de Safi" qui a permis de digitaliser 1.000 années de l'histoire de cette ville et le rendre accessible, à travers un moteur de recherche et une application spéciale, outre la digitalisation du contenu de "Bayt Dakira " dans la ville d'Essaouira, dont l'accès virtuel est accessible partout dans le monde.
De son côté, le président de l'Université Mohammed V de Rabat, Mohamed Rhachi, a mis en exergue la grande importance accordée par l'université à la question de la digitalisation," qui est devenue un choix incontournable, en tant qu'outil de recherche et d'investigation autour du patrimoine culturel et un levier de sa valorisation", notant qu'un nombre croissant d'institutions à travers le monde ont travaillé sur la digitalisation de leurs collections patrimoniales, pour limiter les risques causés par les guerres, les conflits, les changements climatiques et les catastrophes naturelles.
Il s'agit d'un tournant important dans l'industrie culturelle et dans le domaine du tourisme, dont les retombées se sont manifestées à l'ère du coronavirus, suite à la fermeture forcée des espaces culturels, bibliothèques et musées, a-t-il fait observer.
Cette rencontre scientifique, organisée sous le thème: "la digitalisation au service de la protection et la promotion du patrimoine culturel", en partenariat avec le ministère de la Culture, de la Jeunesse et des Sports, l'ambassade des États-Unis au Maroc, l'USAID, l'Agence de Développement du Digital, l'Université Mohammed VI Polytechnique et l’Université Mohammed V de Rabat, a été l'occasion pour les participants, chacun dans son domaine, de partager leurs expertises et rapprocher les points de vue dans les domaines relatifs au monde digital.
La rencontre a traité, en deux panels, les thématiques de "l'innovation culturelle au temps du digital" et de "la reconstruction virtuelle du patrimoine culturel et historique". Des études de cas au programme de cette rencontre ont permis de visualiser les possibilités offertes par les nouvelles technologies dans la préservation et la promotion du patrimoine et des contenus culturels.