La dette publique de ce pays d'Afrique de l'Est qui a multiplié les emprunts pour faire face à une baisse de revenus de 14% due à la pandémie de Covid-19 et mis en place divers projets d'infrastructure, dépasse désormais les 66 milliards de dollars.
En effet, l'appétit de État kényan n'a pas de limite, son gouvernement vient de recevoir, la semaine dernière, le premier versement du dernier prêt de 257 milliards de shillings (environ 2,34 milliards de dollars) du Fonds monétaire international (FMI). Des montants qui inquiètent les experts, car le Kenya souffre depuis plusieurs années de son endettement. Et surtout, plusieurs de ces prêts arrivent à échéance.
Ce qui n'est pas pour rassurer la société civile kényane qui dénonce le fait que «le gouvernement emprunte pour rembourser les prêts», et donc ne se préoccupe plus en priorité des services aux citoyens. En effet, lorsqu'un pays emprunte pour rembourser des prêts, il n'y a pas de génération de nouvelle richesse et le pays pourrait ne pas être en mesure de rembourser ses prêts à l'avenir.
Selon une étude d'Infotrak sur la perception des Kényans sur la dette extérieure, 81% de la population est en colère, craintive ou anxieuse en raison de la dette croissante du pays, tandis que 62% n'approuvent pas les emprunts réguliers à l'étranger. Pendant ce temps, 52 pc des Kényans jugent la gestion des fonds empruntés par le gouvernement comme "médiocre", tandis que 76 pc pensent que le Kenya obtient la plupart de ses prêts étrangers de la Chine.
Dans le sillage de la pandémie de Covid-19, plusieurs initiatives internationales d'allégement de la dette publique telles que l'Initiative de suspension du service de la dette (DSSI) ont été négociées. Les pays du G20 avaient déjà suspendu courant 2020 le service de la dette de 73 pays (dont une quarantaine en Afrique), un dispositif prolongé jusqu'en juin 2021.
Dans un premier temps, le Kenya n'a pas demandé la suspension de la dette des créanciers multilatéraux et commerciaux afin de «préserver sa cote souveraine et son accès futur aux marchés financiers internationaux», a déclaré le ministre des Finances, Ukur Yatani, cité par Bloomberg.
Le gouvernement kényan a donc joué sur d'autres fronts, tout en tenant compte du fait que la suspension de ses remboursements de prêts pourrait nuire au pays en raison de la composition de sa dette publique. C'est pourquoi priorité a été donnée aux négociations directes avec ses prêteurs bilatéraux comme la Chine, son plus gros créancier après la Banque mondiale.
Au Kenya, la Chine compte pour 21 % de la dette extérieure, juste derrière la Banque mondiale avec 25 %.
L'argentier du Kenya a défendu le recours par Nairobi à la dette en ce temps de pandémie arguant que les fonds obtenus contribueraient à atténuer "les effets dévastateurs de Covid-19 et à préparer le terrain pour la reprise économique".
Dans des déclarations relayées mardi par les médias locaux, M. Yatani a fait valoir que le Kenya, comme de nombreux pays africains, avait besoin d'une aide extérieure pour permettre un assainissement budgétaire et une croissance économique durable.
Concernant le dernier programme d'aide d'un montant de 2,34 milliards de dollars approuvé vendredi dernier par le Conseil d'administration du FMI en faveur du Kenya "pour répondre au besoin urgent de réduction de la vulnérabilité de la dette", le ministre a souligné que cette nouvelle facilité de prêt attendue du FMI faisait partie de sa stratégie budgétaire d'abandon des prêts commerciaux, en précisant que les prêts concessionnels seraient le meilleur moyen de combler les déficits budgétaires pour maintenir le pays à flot.