Plus de 30 millions de personnes ont reçu une première dose d’un vaccin anti-Covid-19, tandis que plus de 3,5 millions ont eu leur deuxième injection, sur une population totale de 67 millions. Un succès inattendu pour un gouvernement qui a accumulé les ratés depuis le début de la pandémie.
Lancée le 08 décembre 2020, la campagne vaccinale conduite par le premier ministre Boris Johnson pour combler les lacunes de sa gestion tardive de la crise sanitaire, constitue désormais un moyen incontournable pour se racheter aux yeux des Britanniques, qui semblent avoir compris que le vaccin sauve des vies.
Le dirigeant conservateur, qui a multiplié les revers au début de la pandémie, a été accusé d'avoir sous-estimé l'ampleur de la crise sanitaire en tardant à confiner le pays la première fois, puis à le reconfiner en automne alors que le nombre de cas flambait.
Il a également fait face à une vague de critiques après l’échec de son programme de tests et de traçage de contacts, qui n’est pas parvenu à enrayer la deuxième vague de coronavirus, malgré les 22 milliards de livres déboursés auprès de sociétés privées sans expérience en santé publique.
Après cette gaffe coûteuse, le gouvernement a décidé de confier la gestion du programme vaccinal au service national de santé (NHS). Une décision que l'exécutif britannique n'a pas regrettée au vu des progrès réalisés jusqu’à présent en termes de vaccination.
A la mi-février, le Royaume-Uni avait déjà réussi à vacciner 15 millions de personnes, soit les quatre catégories les plus vulnérables de la population. De même, il vise à offrir une première dose d'un vaccin anti-Covid-19 à toute la population adulte d'ici fin juillet.
Les observateurs estiment que l'optimisme performatif de Boris Johnson et la clairvoyance de ses deux conseillers scientifiques visionnaires, Chris Whitty et Patrick Valance, sont derrière cette prouesse. Mais il paraît aussi que le cours des événements est décidément en faveur du dirigeant conservateur.
Ainsi, la publication d'une étude de l'Université d'oxford qui recommande de laisser un intervalle entre la première et deuxième dose du vaccin pour réduire la transmission du virus a légèrement conforté la stratégie du gouvernement britannique, qui a tenu à espacer de douze semaines les doses injectées, afin de vacciner le maximum de personnes au plus vite.
Aussi, le gouvernement britannique a décidé de maintenir la vaccination avec le sérum d'AstraZeneca au moment où une quinzaine de pays européens, dont notamment l'Allemagne, la France, l'Italie, les Pays bas et l’Irlande ont décidé de la suspendre, craignant que ce produit ne soit derrière la formation de caillots sanguins chez certaines personnes vaccinées.
Le dirigeant conservateur, qui n’a pas cessé de réitérer son soutien à ce vaccin développé sur le sol britannique à chaque épisode de tension avec l’Union européenne, a pris sa première dose d'AstraZeneca, au lendemain de la confirmation de sa sûreté à la fois par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et par l'Agence européenne des médicaments (EMA).
Produit en Europe, notamment dans deux usines du laboratoire en Belgique et aux Pays-Bays, ce vaccin a été au cœur d’une nouvelle polémique dans le Vieux Continent après l’annonce par AstraZeneca de nouveaux retards prévus dans ses prochaines livraisons dans l'UE, alors qu’au premier trimestre de 2021, le groupe pharmaceutique anglo-suédois n'a livré aux Vingt-Sept que 30 des 120 millions de doses promises.
L’annonce a suscité le mécontentement du bloc européen qui considérait AstraZeneca comme le partenaire le plus fiable dans la lutte contre la pandémie. C'est le premier fabricant avec lequel il avait conclu un contrat d’achat de vaccins, dès août 2020. C'est aussi auprès de cette entreprise pharmaceutique qu’il a commandé le plus de doses, quitte à être critiqué pour avoir trop misé sur un seul laboratoire.
Lors de cette guerre sans merci entre AstraZeneca et l’Union européenne, Boris Johnson s'est à nouveau remis en position de force, fidèle à sa réputation de dirigeant qui se relève de toutes les crises.
En effet, pendant que les dirigeants de l’UE se félicitent d'avoir amené Londres à la table des négociations en menaçant de contrôler leurs exportations de vaccins vers le Royaume-Uni si AstraZeneca ne fournit pas les livraisons promises, M. Johnson n’a pas voulu donner à ses compatriotes l’impression de faiblir, même s'il a été obligé de baisser le ton face aux menaces brandies par Bruxelles.
Selon le quotidien The Times, "le chef du gouvernement britannique aurait promis aux Européens de partager les stocks de l'usine du sous-traitant Halix qui fabrique un ingrédient clé pour le vaccin d'AstraZeneca, aux Pays-Bas". Mais publiquement, le dirigeant conservateur a appelé à éviter une "guerre inutile", prônant les bienfaits d’une "coopération internationale".
Bien que le Royaume-Uni ait enregistré le bilan le plus sinistre en Europe durant la pandémie avec plus de 126.000 décès dus au coronavirus, le succès de la campagne de vaccination a fait grimper légèrement la popularité de Boris Johnson dans les sondages.
Même si une baisse des approvisionnements en vaccins est prévue en mois d’avril, le dirigeant conservateur se dit confiant de pouvoir assurer l’accès de son pays aux sérums précieux et reste déterminé à atteindre son objectif de vacciner tous les adultes d’ici la fin de juillet, dans la perspective de marquer une grande victoire sanitaire, mais aussi politique lors de ce mandat exceptionnel après le Brexit.