1- Depuis octobre 2020, vous êtes directrice du centre Dar Al Maghrib. Quels sont vos projets pour promouvoir davantage la diplomatie culturelle marocaine?
Depuis fin 2020, j’assume en effet avec fierté la direction du Centre Culturel marocain (CCM). Effectivement, Dar Al Maghrib est plus qu’un centre culturel tout court, même si sa mission est de promouvoir la culture, les arts et traditions marocains. Le CCM est l'un des véhicules à travers lesquels s’exprime la vision de SM le Roi Mohammed VI qui veut donner à voir et à connaître, à travers une diplomatie culturelle, le patrimoine civilisationnel et culturel du Maroc, "pour en accroître le rayonnement à l’étranger et mettre en relief son identité unifiée, authentique, riche et plurielle".
Aujourd’hui, nous pouvons nous enorgueillir des efforts incessants du Maroc en matière de paix, de résolution des conflits. Afin de persévérer dans ce sens, le Maroc doit préserver son image de marque, sa réputation et c’est ainsi que la diplomatie culturelle joue un rôle fondamental.
La diplomatie culturelle vise à faire de nous un acteur majeur dans ce monde globalisé. Elle nous octroie un rôle de leadership à l’échelle mondiale. Le Maroc a atteint un dynamisme social, économique et politique, qui sont de véritables acquis, et afin de les fructifier et d’aller de l’avant, il doit se positionner sur la scène mondiale avec une diplomatie culturelle, bien taillée à ses ambitions et ses aspirations.
Et j’ai donc l’honneur de diriger un Centre culturel qui constitue aujourd’hui un laboratoire de la diplomatie culturelle que nous voulons comme Marocains. À titre d’exemple, le Centre se décrit comme "la vitrine du Maroc au Canada". Mais très vite devant l’énorme travail qui se fait, nous nous sommes rendus compte qu’on n’est pas simplement une vitrine que l’on contemple quand on passe à côté. Je préfère parler de « fenêtre », un terme qui donne une vision beaucoup plus large : sur le Maroc millénaire, sur le Maghreb, sur le monde arabe, sur l’Afrique, sur un Islam pacifique, sur des valeurs communes à l’humanité.
Concrètement, l’apport du Centre culturel à la promotion de cette diplomatie culturelle se fait à travers notre programmation ciblée pour faire connaître notre patrimoine, nos arts et cultures.
Aussi, en droite ligne avec la vocation africaine du Maroc, la promotion de l’appartenance africaine constitue un véritable pilier du programme culturel de « Dar Al Maghrib». Cette stratégie s’est traduite notamment par des réalisations culturelles mettant en avant les cultures africaines et des partenariats avec les associations canadiennes de la communauté africaine.
Par ailleurs, le centre appuie de nombreux artistes et intellectuels arabes, qui sont accueillis et se sentent chez eux au Centre. C’est notre vision: une maison marocaine au cœur de la ville, ouverte à tous.
Enfin, dans le cadre de l’amélioration de notre offre, nous travaillons sur la mise en œuvre d’une feuille de route novatrice du CCM, dont l’un des axes prioritaires sera l’établissement de nouveaux partenariats avec des organismes marocains et canadiens, en vue de s’insérer davantage dans le tissu culturel de la société d’accueil et devenir un acteur incontournable de la scène culturelle de la métropole, du Québec et du Canada.
2- Alors que la ville de Montréal est toujours considérée comme une zone rouge et dans l’attente d’un assouplissement des mesures visant à freiner la Covid-19, quels programmes proposez-vous?
Malgré les difficultés, nous sentons que nous sommes au bout de tunnel, après plus d’un an de sacrifices! Ça doit être l’effet du printemps mêlé avec les avancées de la vaccination de masse qui s’opère en ce moment. Oui, il y a comme un sentiment général positif et anxieux en même temps. Le monde a complètement changé et nous sommes devant les défis du 21e siècle.
Malheureusement pour nous, il y a encore beaucoup d’incertitudes. Nous sommes obligés de composer presque au jour le jour. C’est particulièrement le cas pour le secteur culturel dont la survie dépend de la présence de ses publics, des contacts humains qui permettent aux émotions de passer avec intensité. Pourtant, la Covid a bien démontré combien la culture est un besoin essentiel dans nos vies.
En tant que responsable d’un Centre culturel d’envergure, j’ai le devoir d’assurer qu’on saura se recréer, se réinventer, se remettre en question, notamment sur deux plans.
D’abord sur le plan du numérique. Nous nous sommes penchés sur cette question pour donner une nouvelle forme à notre offre de cours, de conférences, de colloques, de débats, etc. On peut facilement observer autour de nous que le numérique va évoluer et deviendra pour les jeunes générations une norme, avec des choix et des possibilités infinis.
Nous travaillons sur une programmation classique en « présentiel » dès que l’ouverture sera possible, mais nous déployons parallèlement une offre novatrice en mode virtuel. La formule hybride deviendra certainement la norme. Nous avons la conviction que la culture et les arts marocains en sortiront gagnants, parce que nous allons toucher et atteindre un public au-delà de Montréal, du Québec et du Canada. Je vois ce défi comme une opportunité, une véritable chance à saisir.
Le deuxième plan est d’être encore plus proche des Marocaines et des Marocains, de leur offrir une culture et un art de qualité qui fait leur fierté. À titre d’exemple, pour fêter le 8 mars, nous avons demandé à des femmes marocaines du Canada de nous parler d’elles-mêmes et de nous offrir des capsules numériques que nous avons diffusées sur nos médias sociaux. Vous ne pouvez pas imaginer le débat que cela a généré entre les Marocains. Je crois que le fait de débattre et d’échanger des idées différentes, c’est ce qu'on appelle un peuple en santé, qui aime confronter ses idées, ses manières de voir et qui est capable d’étaler ses contradictions, toujours dans le respect. C’est ainsi qu’on avance tous ensemble.
3-Parlez nous de votre parcours avant votre nomination à la tête cette plateforme? Et quel regard portez-vous sur la politique du Maroc en matière de promotion des droits des femmes et leur intégration dans les domaines politiques et économique ?
Je suis de cette jeune génération de femmes et d’hommes qui travaillent pour le Maroc de demain et qui ont l’ultime conviction que ce pays à un rôle à jouer, non seulement sur son territoire, mais sur le plan géostratégique mondial. C’est plus de dix siècles de civilisation, de diplomatie avec le monde qui nous oblige, nous les Marocaines et Marocains, à être des acteurs influents sur les conjonctures de ce monde.
Titulaire d’un diplôme d’Etudes supérieures approfondies en sciences économiques, j’ai entamé ma carrière professionnelle en 2007, au sein du ministère des Affaires étrangères, en tant que chargée des relations Maroc-USA et Maroc-Canada à la Direction des affaires américaines, avant d'occuper le poste de conseillère chargée des affaires politiques à l'ambassade du Royaume à Sofia en Bulgarie. Puis, j'ai exercé en tant que chef de service des Institutions spécialisées des Nations unies à la direction de la coopération multilatérale et des affaires économiques internationales.
En 2017, j’ai été désignée Conseiller économique à l’Ambassade du Royaume à Ottawa, avant de prendre, en octobre 2020, les rênes du Centre Dar Al Maghrib.
Et j’ai l’impression que mon parcours, mes études, mes intérêts, mes fonctions et les responsabilités que j’ai assumées au service de mon pays, tout ce bagage accumulé guide mes pas, pour qu’aujourd’hui je me retrouve là, afin de relever ce défi. En toute humilité, je veux réussir pour justement continuer à faire fructifier cette graine plantée par Sa Majesté le Roi en matière de promotion des droits, de la participation politique des Marocaines et Marocains, de l'intégration économique des femmes, pour un développement humain responsable, pour l’environnement, pour les jeunes filles et pour la diaspora marocaine à travers le monde.