Paru aux éditions "L'Harmattan", son ouvrage ente, subtilement et sans distorsions vocabulaires, les deux genres en un essai romanesque traitant la problématique du "Âdi", laquelle se réfléchit sur plusieurs registres sémantiques pour vouloir dire "l'ordinaire", "le normal" mais aussi "l'anodin", tous des serpents de mer dans l'océan de la psychologie.
Le livre de M. Belgnaoui, par ailleurs professeur de psychologie à l'Université Hassan II de Casablanca, passe en effet au crible les grands thèmes de la psychologie, classiques et modernes, à l'aune de récits tirés de son vécu professionnel, lequel vécu est, d'aucuns le savent, jonché quotidiennement d'histoires dont le dénouement retrouve grâce, en partie, en ses capacités d'écoute, d'analyse et de remarque.
L'œuvre, ni exiguë ni démesurée mais plutôt pondérée en termes de pages (154), se veut, par-dessus le marché, un livre de chevet pour tous ceux qui veulent couper le nœud gordien de l'ordinaire et de l'insignifiant.
Il y va de la volonté d'éviter les sens dessus dessous que font éclore, des fois, des ouvrages achalandés de quantités quasi-incommensurables de pages et dont la complexité des notions ou des paradigmes fait perdre le lecteur dans un dédale littéraire...cauchemardesque.
"L’économie de l’usage du mot chez un psychanalyste est une pratique clinique courante", a-t-il sobrement relevé dans un entretien à la MAP, ajoutant que "l’interprétation proposée au patient doit intervenir au moment même où il devient prêt à l’entendre".
De l'aveu de M. Belgnaoui, la teneur de l'ouvrage mais surtout le choix des mots qu'y sont mis sont d'abord "un pari risqué".
"Tout comme dans l’agriculture. En plus de labourer la terre, de l’ensemencer, de la semer, l’alliance des éléments est fortement requise", a-t-il métaphorisé.
Et pour revenir au paradigme du "Âdi", épine dorsale du livre mais néanmoins la seule réponse lancinante à laquelle ont recours la plupart des patients interrogés sur le déroulement de leur train de vie, M. Belgnaoui explique qu'il s'agit du terme communément utilisé, qui revient "spontanément" à l’esprit pour s’obliger à ne pas aller vers le véritable chemin, "la bonne connexion", vers ce passé qui a du mal à passer.
Toutefois, "dès lors qu'une personne entame le récit de sa vie, tout son être devient vivifié, irrigué, enraciné. Elle engage sans peine, une attention soutenue chez qui veut bien l’entendre", a-t-il habilement décrit.
Outre sa formation et son métier de psychanalyste, l'écrivain qu'il est aujourd'hui ne saurait vraisemblablement le devenir sans la conjonction de plusieurs facteurs, dont certainement l'absorption, sans peine ni dégoût, de problèmes ouïs à longueur de journées, leur traduction en "roman" et la recherche, toujours par les mots, de leur issue scientifique.
Il s'agit aussi, pour le thérapeute mental qu'il est, d'un besoin de se vider autrement que par la parole.
"Écrire signifie qu’un psychanalyste demeure aussi une personne comme tout le monde. Il ne peut s’empêcher de répondre à ce même besoin de parler, mais à sa manière, en écrivant", tranche-t-il.