Des bâtiments délabrés et pouvant s'écrouler à tout moment dans l'ancienne médina, Derb Sultan et Hay Mohammadi constituent un tissu urbain fragile qui abrite une population vulnérable et démunie. Les résidents de ces bâtiments, dont la date de construction remonte à près de 100 ans dans certains cas, vivent constamment avec la peur au ventre face à la reproduction de ces incidents.
Les autorités locales, quant à elles, redoublent d'efforts pour éviter des pertes gratuites, d'autant plus qu'un nombre de ces drames est attribué au manque de discernement des occupants. Après leur évacuation de ces constructions, des propriétaires retournent y habituer en faisant fi du danger qui les guette. D'autres refusent carrément de quitter de peur d'être abandonnés en l'absence de "garanties" sur leur relogement, comme l'a expliqué à la MAP une source locale sous couvert de l'anonymat.
La plupart des habitants de ces immeubles sont issus de familles nécessiteuses et vivant dans des conditions difficiles. De plus, ces bâtiments abritent plusieurs familles et cette situation rend difficile l'opération de mise à niveau de ces édifices ou d'évacuation de leurs occupants.
Ce qui risque de compliquer encore plus la situation, c'est que le nombre des immeubles délabrés pourrait augmenter dans les années à venir, à cause de plusieurs facteurs naturels, notamment les impacts de l'érosion et l'humidité dues aux dérèglements climatiques.
L'effondrement d'une partie du mur extérieur de la bâtisse historique de l'hôtel Lincoln, en plein centre-ville, illustre les dangers que représente ce phénomène pour la sécurité publique. A cause de cette chute de pierre survenue en décembre dernier, le réseau du tramway a été longtemps perturbé et les voyageurs excédés. La sécurisation de la zone a causé une suspension du trafic au niveau de ce tronçon central du tramway.
Une ancienne étude réalisée par la division de l'urbanisme au Conseil de la ville sur les constructions menaçant ruine à Casablanca a révélé que le nombre de ces bâtiments est estimé à plus de 2.800 édifices abritant environ 72.000 ménages, dont 1.874 dans l'arrondissement El Fida-Derb Sultan (65 pc), 905 à Casablanca-Anfa (32 pc) et 91 à Hay Mohammadi-Ain Sebâa (3 pc).
Mohamed Marbouh, un acteur associatif, estime dans ce cadre que ces bâtiments constituent un sérieux problème qui hante les habitants de l'ancienne médina, Derb Sultan et Hay Mohammadi au regard de l'effondrement de plusieurs maisons chaque année, surtout que les interventions des pouvoirs publics pour résoudre cette problématique manquent d'efficacité et ne répondent pas aux attentes des personnes lésées, en raison de multiples facteurs liés notamment à l'absence d'une stratégie claire et proactive pour résoudre ce dilemme.
M. Marbouh a affirmé que la solution à cette tragédie humaine passe par le fait d'assurer des logements alternatifs adéquats en se basant sur les résultats de l'enquête statistique menée par les autorités locales, en vue de reloger les familles qui ont abandonné leurs maisons délabrées.
Il a recommandé la réalisation d'une étude à priori et proactive dans la perspective d'éviter ces tragédies sociales qui se reproduisent chaque année, insistant sur l'impératif de conduire ce projet dans la clarté pour barrer la route aux pratiques frauduleuses.
Il a, en outre, indiqué que les populations concernées "sont souvent peu réceptives quant aux initiatives visant à résoudre cette problématique, en raison de leurs faibles moyens financiers et de leurs conditions sociales précaires".
Plusieurs ménages ne paient que des loyers très bas depuis une longue période, ce qui fait que les solutions proposées sont au-dessus de leurs capacités financières, comme l'apport de 100.000 dirhams pour bénéficier d'une maison neuve dans le cadre des programmes institutionnels de relogement, a-t-il expliqué.
Les constructions vétustes dans l’ancienne médina et des quartiers de Derb Sultan et Hay Mohammadi comportent des bâtisses répertoriées comme vulnérables, ce qui requiert des autorités compétentes la recherche de solutions à même de remédier à la situation de manière efficiente.
Une réunion a été tenue, le 19 février courant, à la préfecture d’arrondissement d’Anfa afin d’examiner l’accélération du rythme d’exécution du projet de qualification de l’ancienne médina.
La séance de travail, présidée par le gouverneur de la préfecture, a insisté sur le besoin de s’attaquer à ce dossier au plus vite pour la préservation des vies et des biens, à travers l’intensification de la coordination entre les parties prenantes et la lutte contre les pratiques de réoccupation ou de location des habitations évacuées par l’engagement de poursuites contre toute personne exposant autrui au danger.
Les participants à cette réunion ont lancé un appel pressant pour l’ouverture d’un dialogue sérieux avec les propriétaires des constructions évacuées ou démolies pour parvenir à des formules appropriées concernant leur contribution au financement au programme de restructuration et de mise à niveau de l’ancienne médina, dans un cadre légal transparent.
Quoi qu’il en soit, le traitement de la problématique des constructions menaçant ruine dans la métropole exige des différents acteurs de conjuguer les efforts pour juguler les conséquences de ce phénomène et contenir son impact sur le tissu social dans les zones concernées, en s’appuyant sur l’optimisation des interventions et l’élaboration d’une vision globale, d’autant qu’il s’agit d’un patrimoine urbanistique qui doit être préservé et valorisé.