Dans un article publié dans la revue US "National Review" sous le titre "La décision de Trump sur le Maroc était logique", M. Abrams, qui était représentant spécial américain pour le Venezuela, a critiqué les positions notamment de l'ancien envoyé spécial de l'ONU, James Baker, de l'ancien ambassadeur John Bolton et du sénateur républicain James Inhofe, vis-à-vis de la souveraineté du Royaume au Sahara.
"Pour des raisons qui ne sont pas convaincantes”, ils se sont toujours opposés aux “revendications” territoriales du Maroc et ont soutenu un processus qui ne peut que nuire au Royaume, un “allié important des Etats-Unis dans une région dangereuse", a-t-il fait savoir.
"De plus, a-t-il averti, leurs propositions pourraient offrir le territoire au polisario, une organisation vestige de la Guerre froide dont on ne peut raisonnablement pas s'attendre à ce qu’elle joue le rôle du Maroc dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme".
M. Abrams a révélé que lorsqu’il était directeur des Affaires du Proche-Orient et de l’Afrique du Nord au département d’Etat, sous la première administration de George W. Bush, M. Baker, alors envoyé spécial pour le Sahara, avait dû démissionner "en grande partie" à cause du refus de l’administration Bush de soutenir son plan pour le Sahara.
L’ancien diplomate a précisé que trois raisons ont poussé l’administration Bush à rejeter le plan Baker, la première étant que depuis la Marche Verte, ni feu SM Hassan II ni SM le Roi Mohammed VI "n’ont jamais envisagé de laisser la région se séparer du Maroc".
M. Abrams, qui est actuellement chercheur principal en études du Moyen Orient au Council on Foreign Relations, a par ailleurs fait observer que les Marocains sont unis lorsqu’il s’agit de la question du Sahara.
La deuxième raison derrière le rejet du plan Baker, a poursuivi l’expert en relations internationales, est qu’il aurait pu mener à la création d’un Etat dirigé par le polisario au Sahara.
"Il y a plusieurs raisons pour lesquelles c’était et ça reste toujours une mauvaise idée", a fait remarquer M. Abrams, expliquant notamment que le polisario "dépend depuis des décennies du soutien financier, diplomatique et militaire de l’Algérie qui l’abrite".
"L'Algérie a récemment dénoncé l'établissement par le Maroc de relations diplomatiques avec Israël ; et la frontière terrestre entre les deux pays est fermée depuis 1994", a-t-il rappelé.
L’indépendance du Sahara signifierait que les frontières terrestres du Maroc seraient composées de l’Algérie et de ce qui serait probablement "une dépendance algérienne". "Cela ne serait guère propice à la sécurité, à la prospérité et la stabilité du Maroc", a écrit M. Abrams.
L’expert du Moyen Orient est aussi revenu sur la "relation longue et profonde" entre le Maroc et les Etats-Unis, et le rôle du Royaume comme "un allié majeur" en dehors de l’Otan.
"Il est inconcevable de penser que ce genre de relation sécuritaire puisse exister avec un Etat dirigé par le polisario", a souligné M. Abrams.
Troisièmement, a-t-il ajouté, jamais dans l’histoire n’existait un Etat indépendant au Sahara.
"Il n'y avait et n'y a toujours pas de raison historique, politique ou juridique pressante d'en créer un (…) Si les États-Unis doivent soutenir un référendum d'indépendance pour le Sahara, pourquoi pas pour l'Écosse et la Catalogne ? Pourquoi pas pour le Québec et le Pays de Galles ?", s’est interrogé l’auteur de l’article.
"Compte tenu de ces considérations et d'autres encore, les États-Unis ont rejeté à juste titre le plan Baker", a-t-il soutenu, notant que l’administration américaine de l’époque avait encouragé le gouvernement marocain à développer un plan crédible d’autonomie pour le Sahara, chose faite en 2007.
M. Abrams a mis l’accent sur le soutien consistant de plusieurs administrations américaines, à la fois démocrates et républicaines, au plan d’autonomie marocain, estimant que la pleine reconnaissance de la souveraineté du Maroc sur le Sahara n’était pas une rupture "stupéfiante" par rapports aux précédentes positions américaines, comme l’a jugé M. Baker.
"Il s'agissait plutôt d'une progression logique de ce qui avait été pendant plus d'une décennie, sous les administrations des deux partis, la position américaine : que l'autonomie sous souveraineté marocaine était la meilleure option réaliste", a-t-il relevé.
"En reconnaissant la souveraineté marocaine, les États-Unis ont mis davantage de pression pour une négociation sérieuse d'autonomie qui pourrait mettre fin au conflit. Aucune autre voie ne nous y mènera", a-t-il conclu.