En effet, la superficie des pâturages s’est considérablement rétrécie ces derniers jours en raison des fortes chutes de neige qui se sont abattues en début d’année sur les hauteurs du Moyen Atlas, poussant nombre d’éleveurs à garder leurs bêtes dans les enclos en attendant des jours meilleurs.
Pour pouvoir nourrir leurs troupeaux durant cette période de confinement, les petits éleveurs n’avaient pas d’autres choix que de puiser dans leurs infimes réserves d’aliments, constitués à partir des résidus de cultures et des fourrages cultivés.
C’est le cas notamment de Rachid, un petit éleveur d’ovins de la localité d’Aguelmam Azegza qui trône à plus de 1.400 mètres d’altitude sur les hauteurs du Moyens Atlas.
Avec l’aide de deux bergers et de quelques chiens, il tente de frayer un chemin à son troupeau d’une centaine de têtes, au milieu de l’épaisse couche de neige qui enveloppe la forêt de cèdres.
Il veut faire cap sur les plaines les plus proches qui se trouvent à quelques kilomètres de chez lui en espérant trouver des parcelles de terre encore verdoyantes où son cheptel pourrait pâturer de l'herbe fraîche, le temps que la situation s'améliore en hautes montagnes.
"Cela fait plus de deux semaines que les bêtes n’ont pas quitté l’enclos en raison de la neige qui a envahi les hauteurs couvrant la majeure partie de nos pâturages", a-t-il dit dans une déclaration à la MAP.
"Même si la neige tient encore au sol avec des niveaux atteignant plus de 50 centimètres par endroit, nous avons décidé de sortir le troupeau afin qu’il puisse retrouver le plein air et brouter de la bonne herbe sur les berges", a-t-il ajouté.
Sur un ton plein de tristesse, il a dit qu'il ne pouvait pas maintenir ses bêtes plus longtemps dans les étables car son stock d’aliments commence à s’épuiser.
''Même les sources d’eau ont été gelées en cette période hivernale. Nous sommes obligés de faire fondre de la neige dans des chaudières pour abreuver le bétail'', a-t-il souligné.
Conscient des difficultés que rencontrent chaque année les petits éleveurs des régions montagneuses durant la période du grand froid, le gouvernement a mis en place un programme spécifique d'appui à l'alimentation du cheptel.
Ce programme est déployé à chaque fois que la campagne agricole connaît un déficit pluviométrique qui impacte les parcours de jachère et des cultures fourragères nécessaires à la couverture des besoins alimentaires du cheptel.
A la mi-janvier courant, 130.910 quintaux d’orge subventionnée ont été distribués, dans le cadre de ce programme de sauvegarde du cheptel, au profit de 29.203 éleveurs de la province de Khénifra.
Rachid a qualifié de louables les efforts déployés en faveur des petits éleveurs de bétail, relevant que malgré la mise sur le marché d’importantes quantités d’aliments subventionnés et à des prix très abordables, la plupart des petits éleveurs n’y ont pas accès faute de moyens.
"Nous arrivons à peine à vivre de notre élevage. Il faut dépenser beaucoup d’argent aussi bien pour l’alimentation des bêtes que pour les maintenir en bonne santé", a-t-il expliqué.
En vue de pallier à la problématique du rétrécissement des pâturages et favoriser le développement d'un élevage intensif et moderne dans la province, certains agriculteurs pensent qu'il est nécessaire d’étendre les superficies dédiées aux cultures fourragères.
Mais, en raison de deux années de sécheresse successives où les précipitations ont fait défaut et où les retenues des barrages ont fléchi à des niveaux inquiétants, cette option ne semble pas réaliste dans les conditions actuelles.
L'élevage occupe une place de choix dans les activités agricoles de la province de Khénifra qui recèle un important potentiel de production animale. On y compte un cheptel de plus de 1,3 million de têtes entre caprins (196.300), ovins (1,05 million) et bovins (42.800).
Les éleveurs de la province ont une longue tradition dans ce domaine. Ils s’adonnent particulièrement à l’élevage ovin et caprin de races rustiques bien adaptées au contexte local mais qui restent moins performantes.