Cette longue fermeture, décrétée dès le mois de mars dernier, a eu des conséquences désastreuses tant pour les enfants que pour les parents.
Après une année sans instruction ou presque, les élèves auront du mal à suivre car, si les cours à distance ont été mis en place par certains établissements, très peu de Kényans ont eu accès au matériel technologique nécessaire pour rester à jour avec les programmes scolaires.
Cette longue fermeture des écoles difficilement compréhensible dans un pays où les églises, les restaurants, les magasins n’ont quasiment jamais fermé depuis le début de la pandémie, fait planer le risque d'un décrochage massif puisque des milliers d'écoliers ont manqué à l'appel. Les parents étant pris d'angoisse pour la sécurité de leurs enfants.
"Pour l'heure, on préfère garder nos enfants à la maison. Nous sommes assez inquiets car nous ne savons pas si d'autres enfants dans l'école ont le virus, ou même si des enseignants ont le virus, ou encore le personnel de l'école", confie une maman, citée par les médias kényans qui se sont interrogés sur le prix que la pays paiera pour ses choix face au Covid-19.
En mars dernier, à l'image du reste de la planète, le pays a fermé ses écoles pour limiter la transmission du virus. Mais quatre mois plus tard, en juillet, alors que de nombreux pays avait rouvert ou s’apprêtaient à rouvrir les classes, le Kenya avait pris un chemin singulier en annonçant dès l’été la fin pure et simple de l’année scolaire, rappelle-t-on.
"Il n'y a pas de raison pour que les parents n'envoient pas leurs enfants à l'école", a déclaré le ministre de l'Education George Magoha, en assurant que son département a mis en place des mesures de protection adéquates pour juguler la propagation du Coronavirus.
"Les parents doivent s'assurer de fournir un masque à leurs enfants", a-t-il toutefois insisté à la veille de la rentrée, en ajoutant que le gouvernement fournirait des masques à trois millions d'apprenants nécessiteux.
Il a ainsi demandé aux parents qui peuvent se le permettre d'acheter au moins deux masques pour leurs enfants.
De plus, pour beaucoup de jeunes, aller à l'école est un moyen d’avoir accès à l'eau potable et d’avoir à manger, car ils dépendent des repas scolaires. Six millions d’enfants en milieu rural et 1,4 en milieu urbain ont un accès limité à l'eau potable. Des repas scolaires gratuits ont été fournis à 1,6 million d'entre eux au Kenya en 2019, selon des statistiques du ministère de l'éducation.
En revanche, comme souvent avec les enfants, les professeurs déclarent qu'ils ont toutes les peines du monde à imposer des règles de distanciation physique. La plupart des écoles n'ont pas assez de salles pour répartir les élèves. Et les classes sont souvent combles. "C'est difficile car nous n'avons pas assez de pupitres pour nous assurer que les élèves se tiennent à un mètre les uns des autres, mais nous faisons de notre mieux", a concédé la directrice d'une école primaire, dans le sud-est du pays.
Faire respecter la distanciation physique est un véritable défi et dans certaines écoles, les enseignants ont installé des salles de classe sous les arbres et dans les couloirs.
Pour autant, malgré les propos rassurants du ministre de l’Éducation, les parents restent inquiets et beaucoup d’entre eux exigent la construction de salles de classe supplémentaires.
2020 aura été finalement une année blanche pour le Kenya. Le ministère de l’Éducation avait annoncé début juillet l’annulation des examens à la fin du primaire et du lycée. Par voie de conséquence, l’ensemble des 17 millions de jeunes Kényans actuellement scolarisés resteront dans la même classe cette année.
Une décision aux conséquences très lourde. C’est d’abord un coup d’arrêt à l’apprentissage, mais c’est aussi une charge supplémentaire pour les familles, déjà touchées par la pandémie et qui devraient garder leurs enfants à la maison, s'atteler à leur apprentissage et faire en sorte que les frais de scolarité déjà déboursés cette année sont perdus.
Selon le gouvernement Kényan, cette année blanche décidée au terme d'un mois de discussion, devrait permettre de protéger les enseignants et les élèves, mais également de lutter contre les inégalités constatées depuis la suspension des cours en présentiel en mars dernier. En effet, un grand nombre d'élèves kényans n'ont pas accès aux nouvelles technologies nécessaires pour suivre leurs cours à distance, en particulier ceux qui vivent dans le milieu rural et qui n'ont ni électricité, ni internet et ni ordinateur chez eux, un problème qui a poussé le gouvernement à prendre cette décision radicale et dont les conséquences sont lourdes.
Mais cette décision fortement controversée dans le pays, pourrait selon plusieurs experts kényans, produire l'effet inverse, car les élèves qui ont accès aux nouvelles technologies ont pu continuer à étudier via la télévision, la radio ou internet, alors que les moins privilégiés n'ont pas eu cette possibilité.