Située au nord de Safi, plus précisément dans l'ancienne médina entre deux murailles historiques : celle édifiée par les Almohades au 13è siècle, et la seconde bâtie par les Portugais au début du 16è siècle, cette Coline si bien organisée, telle une "ruche d'abeilles" a eu le mérite, des années durant, de pérenniser ce métier en rassemblant en un seul espace, des ateliers dédiés spécialement à la poterie.
Cette zone rassemble plus de 500 potiers et aide-artisans répartis sur plus d'une quarantaine d'ateliers équipés de 50 fours traditionnels et de 28 fours à gaz.
Une tournée-découverte dans ce lieu enchanteur dont, l'importance historique et patrimoniale, n'est plus à démontrer, permettra à tout un chacun parmi les touristes et visiteurs de s'arrêter le temps de prendre connaissance des différentes étapes de la confection à la main (manière traditionnelle) des objets et articles de poterie.
La Coline des potiers offre une belle séquence où, les acteurs ne sont autres que des artisans, qui à la manière des grands maitres, se livrent, via des gestes synchronisés, à un véritable jeu répétitif de traitement et de modelage de l'argile, avec tant de souplesse, de délicatesse et de précision, tout en donnant libre cours à leur créativité et innovation. Un esprit créatif certes, sans limite, dont jouissent ces détenteurs d'un savoir-faire si singulier et séculaire.
En contrebas de cette attraction phare de Safi, s’alignent les boutiques où, s’amoncellent les fameuses poteries de Safi. Dès que le visiteur gravit les marches pour apprécier, à sa juste valeur, le travail des artisans, il se trouve, dans l'immédiat, convié à une véritable immersion au coeur de toute la chaîne de production et ses temps forts : le décantage de l’argile (et ses bassins), le tournage, le trempage, le séchage, la décoration, la cuisson…etc.
Ce déplacement à la Colline des potiers de Safi est aussi l'occasion de découvrir des échoppes toutes plus belles les unes que les autres, leurs propriétaires rivalisant entre eux pour attirer le plus grand nombre de visiteurs et de touristes.
De ce fait, cette Colline constitue, sans nul conteste, un véritable marché avec un éventail d'articles et d'objets de la poterie de différentes formes et tailles, de quoi mettre le visiteur dans l’embarras du choix : couleurs à profusion, produits artisanaux de qualité. Une ambiance conviviale si vite agrémentée d'un accueil des plus chaleureux que les commerçants veillent scrupuleusement à offrir à leurs clients.
Pour les mordus des chefs-d’œuvre de la poterie Safiote, ils trouveront à la Colline des potiers un large panel de choix, avec des prix très abordables, sans omettre, cependant, de faire une petite visite chemin faisant à la médina, qui est située à quelque encablures.
L’un des ateliers les plus visités par les touristes est celui du grand maître potier, Moulay Ahmed Serghini, qui a contribué à la renommée de la région de Safi et de sa fameuse Colline des potiers.
Ce site abrite aussi des restaurants qui présentent des plats succulents, dont le fameux tagine de boulettes de sardines, recette des plus prisées à Safi.
Dans une déclaration à la MAP, le Conservateur du Musée National de la Céramique, Said Chemsi, a indiqué que le regroupement des potiers dans ce site, lié historiquement à l'art de la céramique, a permis un véritable partage d'expertises entre des artisans ayant hérité un savoir-faire ancestral de père en fils.
Dans le même sillage, il a rappelé que ce Site a été classé "patrimoine national" par le Dahir promulgué le 19 novembre 1920 et publié dans le Bulletin Officiel le 23 novembre de la même année, faisant savoir que le classement de ce site en tant que "monument historique et site ayant un caractère artistique et pittoresque", a grandement contribué à la sauvegarde des Potiers. Un classement qui a joué aussi à la faveur des lieux entourant ce Site en les préservant contre toute altération du cachet authentique de cette zone.
Et de poursuivre que ce Dahir, qui a octroyé aussi ce classement à la mosquée Koutoubia à Marrakech, l’Hôpital Louis à Meknès et les Ruines de Chellah à Rabat, a été une "soupape de sécurité" qui a avorté les convoitises des promoteurs immobiliers français (à l’ère coloniale) qui avaient tenté de convertir cette Coline en un quartier résidentiel.
Ce fin connaisseur de la poterie de Safi et de son histoire, a relevé que les ateliers de poterie ne cessent de proliférer après la création de l’Ecole de la poterie dans la même année (1920), ce qui avait permis d'ancrer cette profession dans la mémoire collective de la population Safiote et de faire de la Cité de l'Océan "la nouvelle Capitale nationale de la poterie".
La position géographique captivante n’est pas le seul critère qui a incité les pouvoirs publics à classer ce site historique "patrimoine national" mais également ses dimensions historiques et son cachet architectural et esthétique, explique-t-on.
A rappeler que la promulgation de ce Dahir en novembre 1920 avait permis la sauvegarde du cachet authentique des ateliers, dont le nombre s’élève actuellement à 43 dédiés à la poterie-céramique, outre le fait d'avoir ouvert la voie à la création de la première école de la céramique au Maroc, par Maalem Boujemaâ Lamali.
Cette école avait pour objectif la formation d’une élite de maîtres artisans, dont la mission était de transmettre le savoir-faire à travers les générations et de renouveler et perpétuer cette activité sur la Colline des Potiers.
M. Chemsi a fait savoir, dans ce sens, que le centenaire de ce classement a été fêté en grande pompe au Musée National de la Céramique, à travers l’organisation d’une exposition temporaire, notant que cet événement a consacré tout un Pavillon à l’Ecole de la poterie créée en 1920, date du classement de la colline "Patrimoine national".
Ce pavillon expose des instruments anciens utilisés dans la poterie, ainsi que des pièces anciennes utilisées par Maâlam Boujemaâ Lamali dans ses cours d’initiation des apprentis-élèves à l’innovation de nouveaux styles et nouveaux motifs et reliefs.
De son côté, le Directeur provincial de l'artisanat à Safi, Youssef Naouis, a souligné que la Colline des Potiers a bénéficié d’un certain nombre de projets d’aménagement et de restauration des ateliers et des fours dans un état délabré et de ruine avancée, afin de préserver le cachet authentique de ce Site, louant au passage les efforts déployés par les autorités provinciales et l'ensemble des intervenants en vue de la valorisation de ce Site.
Dans ce sens, M. Naouis a indiqué que les artisans ont aussi bénéficié de soutien visant à convertir les fours traditionnels très polluants, en fours à gaz, outre un soutien remarquable en ce qui concerne les matières premières utilisées dans la poterie comme au niveau de la commercialisation, à travers la participation aux Salons nationaux et internationaux d’artisanat.
Et de poursuivre que la poterie de Safi ne cesse de se développer avec l'utilisation de techniques et de colorants nouveaux, dans le but de satisfaire le flux des demandes multiples et diversifiées en provenance des quatre coins du monde, se félicitant de voir la ville de Safi s'ériger en capitale de la poterie marocaine et ce, grâce à une multitude de sites, dont les plus importants sont : la Colline des Potiers, la Vallée de Chaâba, le village de Sidi Abderrahmane et la commune Saâdla.
Approché par la MAP, Maâlam Abdellah, s'est attardé, quant à lui, sur les répercussions de la crise sanitaire induite par la Covid-19 sur le secteur, avant de souligner que l'ensemble des artisans de Safi essaient d’innover, au quotidien, car la poterie Safiote a "un label" à promouvoir et à défendre.
Ce label, a-t-il enchainé en conclusion, est reconnu au niveau mondial et est toujours cité comme "référence", étant donné que la poterie de Safi se distingue par sa richesse, ses belles couleurs, son propre style, sa qualité et son design attrayant.