Lors de cette visioconférence, modérée par le consultant indépendant en développement, Olivier Deau, et placée sous le thème "Covid-19, Brexit, Populismes et Récession: Vers la fin de l'UE?", l'ancien Premier ministre irlandais, Bertie Ahern, a souligné que le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne (Brexit) a eu pour conséquence de compliquer la situation de l'UE et lui pose de nouveaux défis majeurs comme la montée des mouvements nationalistes et populistes dans plusieurs pays européens, notamment au Royaume-Uni, et les répercussions socio-économiques de la pandémie du Coronavirus.
Après avoir appelé que le Royaume-Uni à assumer ses engagements vis à vis de l'Europe en cette période de transition afin d'éviter le "no deal", M. Ahern, a affirmé que l'Europe et les États-Unis partagent un ensemble de défis communs qui exigent l'implication du nouveau président Joe Biden, qui, en tant que défenseur du multilatéralisme, peut avoir un impact positif sur les partenariats avec l'Europe et la communauté internationale plus globalement.
Pour sa part, l'ancien Premier ministre grecque, Giorgos Papandreou, a fait remarquer que la Covid-19 n’était pas seulement une crise sanitaire, mais également une crise socio-économique qui a révélé de nombreuses défaillances chez les pays européens et dévoilé des injustices, notamment en matière d'accès aux soins, ce qui représente, selon lui, des incertitudes dont le populisme se nourrit.
Néanmoins, M. Papandreou a mis en lumière l’importante mobilisation et solidarité des pays européens dans la riposte contre la pandémie, appelant ainsi à davantage d'engagement des institutions européennes relever les défis de la crise sanitaire, des changements climatiques dans le cadre du Pacte vert pour l'Europe (European Green Deal), et de l'émergence des mouvements nationalistes et populistes dans plusieurs pays européens.
Affirmant qu'il faudrait promouvoir une nouvelle forme multilatéralisme, plus étendue et constructive, par un travail collectif dans le cadre des institutions internationales afin de mener à bien les projets tels que l'Accord de Paris sur le climat et mettre en œuvre les Objectifs de développement durable (ODD) qui représentent de "réelles opportunités" pour l'Europe , M. Papandreou a souligné que l'Europe "commence à prendre le dessus sur son état d'immobilisme qui a duré plusieurs années" et qu'elle est aujourd'hui en mesure de repenser ses politiques et ses priorités en barrant la route aux "populistes et aux démagogues".
L'ancien Premier ministre lituanien, Andrius Kubilius, a, quant à lui, d'emblée exprimé son optimisme quand à la prospérité de l'UE, affirmant que l'année 2016 a été "l'année de tous les populismes" avec le référendum sur le Brexit et l’élection du président américain Donald Trump, une situation, qu'il estime, trouve son origine dans les crises financière et migratoire.
Aujourd'hui, a-t-il poursuivi, les choses avancent positivement, notamment avec l’élection de Joe Biden à la tête des États-Unis qui s'apparente à "un vent de démocratie qui souffle sur le monde", prédisant ainsi des changements intéressant au sein de l'UE mais également dans les pays de l'Europe de l'est - Biélorussie et Moldavie - qui se détachent progressivement du vivier de populisme qui a mené le Royaume-Uni au Brexit.
De son côté, l'ancien Premier ministre estonien, Taavi Roivas, a estimé que la préservation de la stabilité et la pérennité de l'UE dépend de l’engagement, au même titre, de tous les pays européen, et y compris de celui des États-Unis qui sont appelés à jouer un rôle-pivot au sein de l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN) auquel chaque État consacre un minimum de 2% de son produit intérieur brut (PIB), ajoutant que l'Europe devrait également agir en faveur de l'Afrique dans le cadre d'un multilatéralisme plus fort et plus efficace.
Considérant la présence d'une base populiste en Europe, le vice-président du Think-tank slovaque GLOBSEC, Jakub Wisniewski, a mis en lumière les difficultés d’intégration de certains pays de l'UE, préconisant ainsi une intégration plus réaliste pour une meilleure coopération à même d'inclure les pays en difficulté dans la dynamique de développement, de stabilité et la prospérité, notamment les pays de l'Europe de l'est qui souffrent de dysfonctionnements spécifiques contrairement aux pays de l'Europe de l'ouest comme l'insuffisance des services publics.
A ce titre, M. Wisniewski a affirmé que ce sont ces défaillances d’intégration de pays pro-européens qui créent "une sorte de rébellion contre l'establishment" et favorise les mouvements populistes, soulignant, par ailleurs, que l'UE a également une responsabilité morale envers "ses voisins de la région MENA" donnant ainsi l'exemple du prolongement par le G20 d'une durée de six mois du moratoire sur la dette des pays en développement.
Pour le coordinateur de recherche et coresponsable du Center on Europe & Global Governance, à l'Institut italien pour les études de politique internationale (ISPI), Antonio Villafranca, la covid-19, la récession et le Brexit sont autant d’éléments qui peuvent éventuellement signer la fin de l'UE, une théorie qu'il n'approuve pas car il considère que ces éléments mettent uniquement fin à l'immobilisme de l'UE à travers l'éradication des disparités au sein de l'Union, davantage de cohésion, et la mise en place d'une feuille de route pour l’exécution d'une politique unifiée.
Organisés par l’Institut Amadeus, les "MEDays Talks", placés sous le thème "Dans le sillage de la Covid-19: Ripostes, reprise et disruption", se tiennent du 10 au 17 novembre en format virtuel à raison de deux panels par jour et connaissent, à l’instar du "Forum MEDays", la participation de personnalités internationales de renom qui prendront part à des discussions et débats sur les grands sujets d’actualité.