Alors que le coronavirus circule activement dans le pays, le gouvernement a fait le choix de réinstaurer le confinement pour stopper l'épidémie. Une mesure entrée en vigueur vendredi dernier et qui stipule, entre autres, la fermeture, pour au moins quatre semaines, de tous « les commerces non indispensables ».
Une décision qui n’est pas du goût des petits commerçants qui crient à l’iniquité face aux géants de la distribution et… à Amazon, qui vont rafler la mise.
Déjà fragilisés par le premier confinement, et bien avant par le poids des géants de la grande distribution et l’augmentation exponentielle des ventes en ligne, le commerce de proximité n’a pas manqué de manifester sa colère, annonçant une rébellion contre les nouvelles mesures restrictives de l'exécutif. Une fronde à laquelle se sont joints les élus et les maires.
En France, le commerce de proximité représente plus de 600.000 entreprises, 20% du PIB, 1,2 million de salariés et 3 millions d’actifs. Composé à hauteur de 95% de très petites entreprises, ce commerce, dont le tissu est principalement situé en centre-ville, est très prisé les Français car il participe au renforcement du lien social.
Face à cette situation, certains commerçants, qui n’ont eu d’autres choix que de se plier aux directives, se sont résignés à recourir au« click and collect». Ce système permet au client de faire ses achats en ligne sur le site internet d'un commerçant avant de venir récupérer ses produits à l'extérieur du magasin.
Vanté ces derniers jours y compris au sein du gouvernement, le « click and collect» avait déjà été utilisé par les petits commerces, au printemps dernier alors que la France étaient soumise à un strict confinement. A l'heure actuelle il est fortement recommandé pour composer avec la deuxième déferlante du Covid-19, y compris par le gouvernement.
Le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, a d'ailleurs encouragé, tout récemment, les petits commerces à créer des sites internet pour proposer leurs produits en ligne. Encore faudrait-il qu’ils en maitrisent la technique!
A l’heure où un confinement « plus souple » est réinstauré en France avec le maintien de l’ouverture des établissements scolaires et une économie qui continue à fonctionner, d’autres petits commerçants ont décidé de braver la décision des autorités et de maintenir ouverts leur magasin. Ils sont soutenus en cela par certains maires qui ont publié des arrêtés d’ouverture dans un geste de défi assuré et assumé, fortement dénoncé comme "irresponsables" par l'exécutif.
Face à cette fronde et en vue de calmer une situation explosive alors que certains pays européens, comme l’Espagne et l’Italie, font face à des mouvements de protestation contre les mesures restrictives, le gouvernement a décidé de restreindre la liste des produits autorisés à la vente en grande surface. Une décision qui est, elle aussi, fortement critiquée.
Mardi, un décret a été publié précisant la liste des produits dits "essentiels" qui pourront encore être vendus par "les supermarchés, les magasins multi-commerces, les hypermarchés et les autres magasins de vente d’une surface de plus de 400m²".
Le décret stipule ainsi que les grandes surfaces doivent fermer leurs rayons dédiés aux produits textiles, culturels, aux jouets, aux meubles ou encore aux fleurs. Toutefois, le gouvernement a laissé une "tolérance" jusqu'à mercredi pour l'application de la mesure.
De plus, les grandes surfaces ne peuvent pas «accueillir un nombre de clients supérieur à celui permettant de réserver à chacun une surface de 4 m2 ».
Sensée destinée à calmer les petits commerçants et les élus, la décision du gouvernement a soulevé, par contre, l’ire de la grande distribution qui a fait part de sa "totale incompréhension".
Selon la Fédération du commerce et de la distribution (FCD), qui représente Carrefour, Casino ou encore Auchan, "une telle mesure ne réglerait en rien les difficultés du petit commerce. Elle mettrait en difficulté nos fournisseurs. Et elle pénaliserait les Français, notamment ceux qui ne peuvent acheter en ligne".
La décision du gouvernement « entraînerait des conséquences sociales lourdes et injustifiées pour des dizaines de milliers de salariés, tout en renforçant Amazon », s’insurge encore la FCD.
Sur ce dernier point, le commerce de proximité et la grande distribution semblent se rejoindre. Tous deux craignent une hégémonie à peine voilée du leader mondial de l’e-commerce Amazon, qui a déjà renforcé ses ventes durant le premier confinement et qu'il ne rafle encore la mise lors du second.
Récemment, le patron du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, qui, bien avant la décision de l’exécutif de confiner de nouveau le pays, avait tiré la sonnette d’alarme sur le risque de l’effondrement de l’économie française, s’est inquiété qu’Amazon ne « sorte grand vainqueur » de la crise sanitaire.
Mais le gouvernement, lui, préfère aider les petites enseignes à vendre en ligne, plutôt que de « réguler par le bas » en restreignant l’e-commerce pour Amazon. « Rappelons qu’Amazon ne représente que 20 % de l’e-commerce en France », a tempéré le Secrétaire d’Etat au numérique Cédric O, en citant les sites français Fnac, CDiscount, Veepee ou Mirakl qui s'en sortent plutôt bien.
En France, le commerce de proximité est obligé de se réinventer et de s’accommoder avec les exigences de la situation. Il se doit aussi de se frayer une place sur le marché prometteur de la vente en ligne. D’autant qu’il existe une réelle demande des consommateurs. Il y va de sa survie !