Enchaînant les meetings et les tournées, les candidats Alassane Ouattara, président sortant, et Kouadio Konan Bertin, ancien député, semblent se soucier peu de l'appel à la "désobéissance civile" et au "boycott actif", lancé par deux autres prétendants : Henri Konan Bédié (86 ans), ex-chef de l'Etat et président du principal parti de l'opposition (PDCI) et Affi N'Guessan (67 ans), ancien premier ministre sous Laurent Gbagbo (FPI).
Depuis le lancement de la campagne, le 15 octobre, le président Ouattara, 78 ans, a pris son bâton de pèlerin et est allé à la rencontre de ses partisans dans plusieurs villes du pays, avec d'imposants rassemblements, particulièrement à Bouaké, la deuxième plus grande ville du pays et fief de l'ancienne rébellion.
"Un coup KO", en allusion à une victoire dès le premier tour, telle est la locution ressassée sans lassitude lors des imposants meetings animés par "ADO", sobriquet affectueusement donné à l'actuel locataire du palais présidentiel qui ne manque aucune occasion pour rappeler les performances économiques "spectaculaires" accomplies lors de ses deux mandats.
Quant à Kouadio Konan Bertin, qui a claqué la porte au PDCI de son mentor Henri Konan Bédié pour faire cavalier seul, il multiplie lui aussi les sorties et les virées et a même lancé une web TV pour faire connaitre son programme. Une initiative qui viserait à séduire les jeunes ivoiriens, désormais très adeptes des réseaux sociaux.
S'activant en loup solitaire, KKB, 51 ans, n'en est pas à son coup d'essai. Déjà en 2015, il s’était présenté au scrutin présidentiel malgré les directives de son parti (PDCI) qui avait alors décidé de ne pas présenter de candidat et de soutenir la candidature d'Alassane Ouattara, reconduit. Il n’avait engrangé que 3,88 % des suffrages.
Du côté des candidats de l'opposition, qui se sont dits "non concernés" par le processus électoral, le "boycott actif" est le dernier mot d'ordre d'une série de réactions formulées depuis l'annonce du président Ouattara de sa candidature à un autre mandat, à la suite du décès de son dauphin désigné, l'ex-premier ministre Amadou Gon Coulibaly.
Outre le "boycott actif", leur appel à la "désobéissance civile" a été à l'origine de tensions et de heurts dans plusieurs localités. Au moins sept personnes ont été tuées et plusieurs autres blessées dans des affrontements intercommunautaires, survenus entre lundi et mercredi à Dabou, à 50 km à l'ouest d'Abidjan.
Lundi dernier, un mort et plusieurs blessés ont été également enregistrés suite à des affrontements entre manifestants et forces de l'ordre à Bonoua, ville située à 50 km à l'Est d'Abidjan.
Entre vendredi et dimanche dernier, des violences intercommunautaires ont aussi fait au moins deux morts à Bongouanou (200 km au nord d'Abidjan), fief de Pascal Affi N'Guessan.
Dans le cadre de sa diplomatie "préventive", la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui a dépêché une mission ministérielle à deux reprises à Abidjan, a exhorté le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) et le Front populaire ivoirien (FPI), à reconsidérer sérieusement la décision de boycotter le processus électoral.
Le bloc régional les a également appelés à revoir l’appel à la "désobéissance civile" et "à œuvrer plutôt de façon sérieuse pour parvenir à un consensus sur le processus électoral puis qu’ils ne pourraient pas être en mesure de contrôler les excès qui résulteraient de leur appel à la désobéissance civile".
La campagne électorale prendra fin le 29 octobre prochain dans ce pays où la crise post-électorale de 2010-2011, née du refus de Laurent Gbagbo d'admettre la victoire d'Alassane Ouattara, avait fait quelque 3.000 morts, selon des chiffres officiels.
Plus de 900.000 nouveaux électeurs se sont enregistrés sur les listes en Côte d'Ivoire en vue de l'élection présidentielle, portant le total du collège électoral à 7,5 millions dans ce pays ouest-africain qui compte 25 millions d'habitants, avec une population très jeune et plusieurs millions de résidents étrangers.