A un cheveu d’un accord sur une coalition dite « Vivaldi », qui devait rassembler autour d’une majorité la famille socialiste (PS-sp.a), la famille libérale (MR-Open VLD), la famille écologiste (Ecolo-Groen), complétée par l’appui du centriste flamand CD&V, le président des libéraux francophones (MR) Georges-Louis Bouchez a jeté un pavé dans la mare, dimanche soir, au cours d’une réunion cruciale de finalisation de la coalition, en refusant notamment l’idée d’un Premier ministre en dehors de sa formation politique.
D’autres protagonistes lui reprochent «ses retards, son manque de concentration pendant les réunions, ses sorties médiatiques hasardeuses et sa non maitrise du néerlandais et de la technicité des dossiers», sans compter son intransigeance sur certains points de l’accord devant constituer la charte du futur gouvernement.
Cette situation a poussé les deux préformateurs Egbert Lachaert et Conner Rousseau à présenter leur démission, lundi soir, au Roi des Belges qui l’a refusée et leur a demandé de poursuivre leur mission.
Le Roi Philippe a demandé à cette occasion à tous les partis politiques concernés de rétablir au plus vite la confiance et dit attendre un nouveau rapport des préformateurs au plus tard mercredi.
Il s’agit de la énième tentative de former un gouvernement fédéral après les élections du 26 mai 2019 dans un contexte marqué par la recrudescence des cas de contaminations au nouveau coronavirus et surtout ses conséquences économiques et sociales importantes.
Contrairement à d’autres Etats européens, la Belgique, à défaut d’un gouvernement fédéral, n’a toujours pas son plan de relance. Les différentes mesures sont prises par un gouvernement qui expédie les affaires courantes et par les gouvernements locaux.
Réagissent aux dernières péripéties rencontrées dans les négociations fédérales, la presse aussi bien francophone que néerlandophone considère que les politiques n'ont désormais plus le droit à l'échec. En moins de 48 heures, ils doivent sortir le pays de l’impasse. Pour les moins optimistes, la confiance est déjà rompue. Il est trop tard pour redorer le blason du monde politique.
Pour la Libre Belgique, jamais le pays n’a connu une situation «aussi ubuesque, dantesque », faisant remarquer que «les citoyens sont éberlués, épuisés. Ils n’en peuvent plus de ce mauvais cinéma ».
"Insupportable", estime Le Soir, soulignant la gravité de la situation rencontrée actuellement dans la formation d’un gouvernement fédéral et notant qu’«il y a bien sûr des responsabilités individuelles dans ce spectacle qui laissera des traces, quelle qu’en soit l’issue (…) et une responsabilité collective de la classe politique ».
Le quotidien économique «L'Echo» se demande, lui, si les politiques "se rendent compte" de la situation.
"Les sept partis qui négocient une coalition Vivaldi ont offert, ces dernières heures, une dispute digne d’une cour de récréation", fustige le quotidien, estimant que "le spectacle offert provoque un dégoût profond chez une part croissante de la population. Tout bénéfice pour les démagogues, les populistes, les extrémistes".
Au nord du pays, le constat est le même. "Le jour où on aurait enfin dû offrir aux Belges la perspective d'un nouveau gouvernement , l'interminable feuilleton politique a pris une nouvelle tournure embarrassante.
"Honteux", tance le quotidien flamand De Standaard qui regrette que l'intérêt du pays passe après celui des politiques et de leurs partis.
Pour le journal «De Tijd», la situation actuelle risque d'avoir de graves répercussions dans le futur. "Même si les négociateurs gouvernementaux franchissent le pas dans les prochaines 48 heures, la question demeure de savoir s'ils seront capables de se débarrasser de la méfiance manifeste d'aujourd'hui", écrit le quotidien flamand.
Seize mois après les législatives, la Belgique se cherche toujours un gouvernement de pleins pouvoirs jouissant d'une légitimité et d'une majorité confortable au Parlement. Mais les observateurs n’écartent pas l’échec du projet de la coalition Vivaldi.
Dans ce cas, deux scénarios se profilent à l’horizon. Soit l’entrée en jeu des nationalistes flamands (N-VA), mais là encore il faut chercher une majorité sans les libéraux et les écolos, ce qui s’avère difficile.
Le deuxième scénario qui devient de plus en plus incontournable est celui du retour aux urnes, qui, pour certains est «plus sain démocratiquement» car après tous ces échecs et surtout la crise du coronavirus, le citoyen s’est forgé sa petite idée !