Jakarta, cette mégapole de 30 millions d’habitants, a payé doublement le prix de son "aubaine démographique", conjuguée à un dé-confinement hâtif pour redynamiser une économie en berne depuis mars dernier. La forte mobilité des Jakartiens et les rassemblements de masse ont également permis à l’épidémie de sévir dangereusement dans la ville.
Gagnés par la déception, les habitants de la capitale semblent mal digérer cette nouvelle décision, qui tombe tel un couperet sur la cité. Une atmosphère lourde et morose vient ainsi s’installer dans les places publiques, malls et artères commerciales de Jakarta, mettant fin à une période de transition vers "la nouvelle normalité", qui n’a jamais vu le jour.
Avec un ton ferme, le gouverneur de Jakarta, Anis Baswedan, a appelé l’ensemble des citoyens à se conformer aux nouvelles mesures et restrictions sociales, pour maîtriser la montée en flèche des infections dans la capitale et, partant, pallier au risque d’encombrement des hôpitaux de la cité.
"Durant ce deuxième confinement, les citadins sont appelés à travailler, étudier et prier depuis leurs maisons", a insisté M. Baswedan qui s'exprimait lors d'une conférence de presse, précisant que le télétravail redevient une obligation en vue de réduire les déplacements et, par conséquent, les risques de contamination dans Jakarta et ses villes satellites.
L'édile indonésien a aussi révélé que l'auto-isolement à domicile des personnes testées positives à la Covid-19 relève du passé, soulignant que des hôtels de deux à trois étoiles à Jakarta et à Bali, à la charge des autorités indonésiennes, vont constituer dorénavant les nouveaux locaux pour la mise en quarantaine des patients.
S’agissant des commerces, une dizaine de secteurs d’activité jugés essentiels seront autorisés à opérer de manière normale. Pour ce qui est des espaces de restauration, l’offre se limite désormais à des commandes "à emporter" ou à des livraisons à domicile.
Interrogé par MAP-Jakarta, le gérant d’un restaurant de la place n’a pas caché sa déception, précisant que seules quatre commandes ont été enregistrées durant le premier jour du confinement partiel à Jakarta.
"Avec ce rythme médiocre nous n’arriverons sûrement pas à couvrir nos charges même si le personnel a été réduit de moitié", a-t-il déploré, précisant que certains commerces ont carrément fait le choix de fermer pour ne pas tomber dans la même situation.
Et c’est le cas pour plusieurs locaux au prestigieux mall "Kota Kasablanka" (ville de Casablanca), situé sur une avenue qui porte le même nom, au sud de Jakarta, après la conclusion d’un jumelage entre la capitale économique du Maroc et celle administrative de l’Indonésie en 1990.
"Alors que la majorité des centre commerciaux de Jakarta sont ouverts jusqu’à 21h, l’horaire de la fermeture a été relevé à 20h00 à Kota Kasablanka, à compter de mercredi, vu la grande affluence", a confié à la MAP Soulayman, un agent de sécurité qui supervise la prise de température des visiteurs à l’entrée, en les invitant à respecter les mesures de la distanciation physique.
Si le nouveau confinement a significativement affecté les commerces de la capitale, son impact sur la croissance économique du pays risque d'être plus important.
L'économie de l'Indonésie avait reculé de 5,32% au deuxième trimestre, comparativement à la même période de l'année dernière, signant ainsi la première contraction trimestrielle depuis 1999.
Pour ce qui est du trimestre en cours, le gouvernement indonésien s'attendait, selon un premier scénario, à ce que l'économie affiche, au mieux, une croissance stable ou, au pire, une contraction de 2,1 pc. Cette deuxième hypothèse semble plus favorisée par les économistes après le deuxième verrouillage partiel de Jakarta.
Une éventuelle contraction de l'économie au troisième trimestre devrait entrainer la première économie de l'Asie du Sud-Est vers la première récession depuis la crise financière asiatique de 1998. Les prochains jours apporteront la réponse !