A postériori, les réseaux sociaux sont devenus la nouvelle arène des fanatiques du football. L'adversité des supporters a vu son lieu d’action traditionnel s’étendre vers les plateformes virtuelles. Facebook, Twitter, Instagram, TikTok… sont devenus les nouveaux gradins des hooligans, certes virtuels mais avec autant d’influence sur le monde du football.
De nombreuses questions sont devenues récurrentes et essentielles à force de constater le danger que représente ce phénomène : Quelles sont les raisons de cette nouvelle tendance de ces dernières années ? Quelle est la différence entre le supporter sur le terrain et celui sur les réseaux sociaux ? Est-ce que les RS ont permis à certaines personnes (fans) timides d'être plus expressives jusqu’à devenir agressives ? Quelles sont les conséquences de ce phénomène ? Aura-t-il de l’influence sur le sport national et les joueurs ?
Selon Mohamed Douyeb, fondateur de la plateforme "Le Media" et président-cofondateur du think tank "Digital Act", approché par la MAP afin de voir plus clair et essayer de déchiffrer ce fléau qui commence à prendre une grande ampleur, le sport, qui est en principe porteur de valeurs positives, devient un terrain d’affrontement agressif sur les réseaux sociaux.
Cela se produit, explique-t-il, via des pratiques telles que le cyberharcèlement, l’appel à la violence, l’atteinte à la vie privée, les menaces d'atteinte physique...
Selon l’expert des médias et du contenu des organisations, le football incarne le plus cette réalité, pour des raisons objectives, car il est le premier sport suivi dans le monde.
"La haine exprimée par les supporters devient une tendance lourde, un véritable phénomène. Certains experts et chercheurs parlent d’un fanatisme sportif qui peut même des fois ressembler à un fanatisme religieux sur les réseaux sociaux", souligne M. Douyeb avant d’ajouter qu’un tel phénomène, au Maroc, devrait être étudié et analysé par des sociologues.
Essayant de faire la part des choses, le fondateur de la plateforme "Le Media" explique que si le profil type du supporter sur le terrain est assez bien cerné, ce n’est pas le cas de celui des réseaux sociaux, d'autant plus que l'anonymat est généralement la règle. Plusieurs internautes croient que l'anonymat donne droit à tous les dérapages et que chez une bonne partie des utilisateurs anonymes des réseaux, on décèle un sentiment d'être au-dessus des autres et au-dessus des lois. Ils ne sont même pas conscients des dégâts induits et ceux qu’ils peuvent provoquer.
Concernant la tendance des fans timides à être plus expressives sur les réseaux sociaux au point de devenir des fois agressives, M. Douyeb précise que "ce sont les psychologues et les psychanalystes qui devraient nous renseigner sur cette question", soulignant qu’il y a un esprit de communauté voire un comportement de meutes, lorsqu'il s’agit du sport et plus particulièrement de football.
De facto, le principe est simple : "Pour être admis dans une meute, je dois appliquer à la lettre le mode opératoire", résume-t-il.
Le "hooliganisme" sur le web n'est pas lié seulement aux "classes inférieures" et à des personnes "non-instruites", comme on prétend toujours. On remarque de plus en plus de soi-disant intellectuels ou de personnes appartenant à la classe sociale supérieure exprimer leur agressivité et attisent la haine. Une lecture sociologique s'avère, là aussi, nécessaire tellement il est très difficile de s'avancer sur ce terrain en l'absence d'indicateurs-clés pour pouvoir dégager une tendance.
D'un côté, ce phénomène a malheureusement provoqué des conséquences très alarmantes au niveau de la gestion sportive nationale, rendant ainsi de plus en plus difficile son exercice dans un environnement sain et normal. D’un autre côté, les joueurs, très présents sur les réseaux sociaux, sont devenus la cible des fanatiques sportifs à la moindre fausse note ou suite à une publication maladroite.
Les réseaux sociaux peuvent être un excellent levier pour la promotion du sport et de ses valeurs universelles. Pour atteindre cet objectif, l'éducation au numérique est une nécessité. La balle est dans le camp des associations des supporters, des clubs et des fédérations, conclut le président-cofondateur du think tank "Digital Act".