Réalisé sous la direction d'Abdelhak Najib et Noureddine Bousfiha, l’ouvrage est une promenade bien particulière à laquelle sont conviés 54 écrivains et intellectuels de tous les horizons, qui défilent pour livrer leurs pensées sur la question de “la peur” dans une société contemporaine ayant connu “une formidable évolution” mais aussi “un énorme bouleversement”.
Le titre, qui résume cette œuvre, est “un cri pour agir, une exhortation qui recèle une formidable opportunité : celle qui va permettre de tracer l'avenir et donner écho aux fruits passé”, a écrit dans son préambule l'auteur universitaire et chercheur, Jean- Marie Heydt.
“Il n'en demeure pas moins que se risquer de parler des peurs, de ses peurs, ne pouvait se conjuguer au singulier”, relève M. Heydt, notant que “seul un ouvrage collectif peut se permettre ces regards croisés susceptibles d'exprimer la peur… et ce, sans crainte d'être jugé pour avoir osé dire…”.
“J’ai toujours été frappé par la façon dont les économistes, alors même qu'ils cherchent à faire valoir des modèles qui se rapprochent autant qu'il est possible des sciences exactes, parlent pour décrire un contexte favorable du retour d'un climat de confiance”, confie le docteur en anthropologie, ethnologie et sciences des religions, Faouzi Skalli.
Pour lui, les contributions des auteurs du livre s'en font l'écho et osent offrir à la réflexion de tout ce nouveau chantier.
Le paradigme sur lequel le Maroc vivait au 20éme siècle est, aujourd'hui, dépassé. Il est devenu obsolète. Il en faut nécessairement construire un autre, un nouveau, qui prenne en compte des données nouvelles comme l'émergence d'un individu, entrain de devenir citoyen qui, à défaut d'être bien instruit, est relativement bien informé, a estimé le journaliste et directeur général de la MAP, Khalil Hachimi Idrissi, dans un chapitre introductif sur l'extinction d'un paradigme.
Une déconstruction est en cours de ce qui faisait par le passé les caractéristiques essentielles de la marocanité ou de l'identité du Marocain. Comment est-on arrivé là ? Comment s'est opérée cette dissolution ? Que va sortir du maelstrom actuel? , s'est interrogé M. Hachimi Idrissi.
Évoquant la liberté d'expression “absolue” dans les médias sociaux, M. Hachimi Idrissi dresse une image de cette “boîte à outils intellectuelle” dont les “leaders d'aujourd'hui sont numériques, incultes, instantanés et omniscients. Leur culture se mesure en clics, leur expertise en “j’aime” et leur pertinence en “ partage” !
Pour le réalisateur Mohamed Mouftakir, ”la peur est un sentiment qu'on ressent chaque seconde, chaque minute, chaque heure et chaque jour. La peur est un sentiment qui nous accompagne toute notre vie”.
Dans sa contribution intitulée la Peur, le réalisateur marocain imagine un dialogue entre un père et son fils sur le sentiment de la peur. “As-tu vraiment peur, papa ? Oui j'ai trop peur mon enfant” !, écrit-il.
L’auteure et directrice de la rédaction de Maroc Diplomatique, Souad Mekkaoui, se penche, quant à elle, sur cette "puissante et intense émotion humaine", qui se conjugue au pluriel.
"Si pendant des siècles, nous avons joui du sentiment de liberté, nous entrons, aujourd'hui, dans l'ère de l'inquiétude", concède Mme Mekkaoui dans sa contribution intitulée "La peur, cette deuxième nature qui nous étreint".
Illustré par les peintures de Nadia Chellaoui, “Maroc, de quoi avons-nous peur?” a réuni au total 54 contributions de différents auteurs, penseurs, analystes et artistes, avec des articles en français, en arabe et en anglais.
Il est à noter qu'une partie du financement de cet ouvrage a été assurée par certains de ses auteurs.