1-Quelle stratégie de déconfinement doit-être envisagée par les autorités compétentes?
Avec la pandémie du Covid-19, le Maroc comme la plupart des pays du monde, se trouve confronté à une équation à multiples inconnues, d’une très grande complexité aux enjeux sanitaires, économiques et politiques considérables. Dès le début de la propagation de la pandémie, l’État marocain a pris toutes les mesures nécessaires pour enrayer la propagation du virus et protéger la santé des citoyens.
Tout d’abord, il faut rappeler qu’aucune stratégie de déconfinement ne peut se faire sans revenir aux indicateurs médicaux utilisés par les autorités sanitaires pour suivre l’évolution de la propagation de la pandémie, et sa réussite dépendra de l'engagement responsable de chaque citoyen.
La propagation du virus étant disparate d’une région à une autre, l’État marocain peut élaborer une stratégie nationale de déconfinement progressif avec éventuellement des spécificités régionales.
Dans les conditions actuelles, une stratégie de ''big bang'' est à proscrire. On ne peut faire sortir tout le monde au même moment vu l’état actuel des indicateurs médicaux. Privilégier la santé des citoyens sur tout autre élément doit rester la priorité de l’État. Dans certains pays, on parle aussi de stratégie ''start and go'' qui consiste à alterner des périodes de déconfinement et de reconfinement en fonction de l’évolution de la pandémie. Ce scénario peut également être envisagé.
Il est important de souligner que certaines règles resteront en vigueur, peu importe la phase de déconfinement dans laquelle on se trouve. Il s’agit essentiellement de limiter les contacts entre personnes, de respecter les distances de sécurité et d’adopter les bons réflexes en matière d’hygiène.
Pour ce faire, il est impératif de renforcer les mesures de protection sanitaires des citoyens, à travers une disponibilité suffisante des masques dont le port doit rester obligatoire, une hausse du volume des tests, le maintien et le renforcement des mesures barrières et de distanciation sociale et une limitation stricte des déplacements, outre une quasi-interdiction des rassemblements et des manifestations.
On peut projeter un déconfinement différencié selon les régions du pays en fonction de critères fixés par les autorités sanitaires, comme le niveau de circulation du virus, le taux d’occupation des services de réanimation et l’avancée dans la politique des tests.
2-Quels sont les secteurs qui doivent être prioritaires dans tout processus de déconfinement ?
En ce qui concerne l’organisation du travail, il faudra réduire le nombre de personnes dans les groupements. Il sera ainsi une référence pour un redémarrage économique progressif dans des conditions saines et sûres pour tous.
Néanmoins, les secteurs qui s’y prêtent parfaitement au télétravail doivent continuer leurs activités à distance.
Le secteur le plus prioritaire à mon avis est celui de la santé puisqu’il s’agit de renforcer le dispositif du suivi du risque épidémique et de la veille sanitaire. Il faut aussi s’occuper de la reprise de l’offre de soins et de la gestion de l’éventuel effet de report de soins en matière sanitaire.
Certains secteurs du tissu économique dont l’activité ne peut -ou difficilement- se faire à distance peuvent reprendre le travail avec des mesures de prévention strictes et bien étudiées, tels les transports publics.
Cette phase de déconfinement progressif permettra de rouvrir les commerces, en même temps. Cette réouverture doit s’accompagner de conditions de sécurité, notamment l’organisation du travail, l’accueil des clients, la limitation de l’accès aux commerces pour éviter les effets de foule.
Par contre, il est trop tôt de parler de déconfinement pour certaines activités sources de grands rassemblements de personnes comme la restauration, les cafés, le tourisme, le sport et la culture.
3-Quelles leçons peuvent être tirées de cette crise sanitaire ? En quoi l'après-Coronavirus sera-t-il différent ?
La pandémie du Covid-19 a révélé au monde entier de précieuses informations sur le plan économique, social, politique et humain. Certaines étaient déjà connues et se sont simplement confirmées, tandis que d’autres ont été de véritables découvertes. Une chose est sûre, ce coronavirus a mis à plat le monde entier et au même pied d’égalité toutes les nations.
Contrairement aux idées reçues, en particulier concernant les pays de l’occident, aucune nation n’a été préparée pour ce genre d’évènement et tout le monde a été pris au dépourvu.
La pandémie Covid-19 nous révèle cependant plusieurs leçons à tirer aussi bien sur le plan sanitaire, économique, social que politique et humain.
La première leçon à retenir est l’importance du facteur humain dans la gestion d’une telle crise. La mobilisation et l’abnégation hors du commun des médecins, des infirmiers, des enseignants, des gardiens de paix, pour empêcher le pire à notre nation en est plus qu’une preuve.
La deuxième leçon est qu’il faut arrêter avec les stratégies sectorielles et œuvrer selon une approche multidisciplinaire. Cette crise a mis en exergue l’interdépendance des secteurs comme la santé, la sécurité, l’économie et l’éducation.
Force est de constater que ce choc du coronavirus intervient à un moment clé de l’histoire de notre pays, à l’heure où le Maroc est à la recherche d’un nouveau modèle de développement. De ce fait, il doit se préparer à l’ère de l’après-corona en tirant les leçons des grands changements induits par la crise du Covid-19. Plusieurs nouveaux paramètres sont à prendre en compte dans l’élaboration dudit nouveau modèle de développement.
Le Maroc est désigné parmi les pays modèles dans la gestion de cette crise grâce à la clairvoyance de SM le Roi Mohammed VI, la solidarité exemplaire des citoyens et l’intelligence collective de tout un peuple.
La pandémie du coronavirus a mis en lumière plusieurs défaillances au niveau mondial pour ne citer que l’exemple de l’insuffisance des masques dans des pays considérés parmi les plus industrialisés.
Le Maroc, à l’image d’autres États, doit désormais redimensionner son industrie et œuvrer pour une pleine autonomie vis-à-vis de l’étranger pour les produits stratégiques.
Une priorité particulière est à accorder à l’éducation, la santé, l’intégration du secteur informel, la réduction des inégalités sociales et territoriales, mais à bien d’autres choses encore, ne serait-ce que pour capitaliser sur ce vaste élan de solidarité et pour instaurer un partage plus équitable des richesses.