A l’exception du président Cyril Ramaphosa qui a fait, de l’avis de plusieurs Sud-Africains, montre de leadership en rassurant ses compatriotes et en plaidant pour la gentillesse et la compassion en ces temps durs, les déclarations des autres responsables politiques alimentent la peur.
Le ministre de la Santé, Zweli Mkhize, qui pilote les opérations sur le terrain, n’a pas mâché ses mots en lançant, mercredi, que le recul relatif des nouveaux cas d’infection constaté ces derniers jours n’est que le calme qui précède la tempête.
Du réalisme ou du fearmongering ? les Sud-Africains s’interrogent sur les sites sociaux, seule fenêtre disponible ces temps-ci sur un monde extérieur devenu soudainement virtuel voire imaginaire.
« Sommes-nous préparés ? » s’inquiètent ces Sud-Africains, conscients de la situation de leur pays avec ses innombrables townships, abritant près de 30 pc de la population du pays.
Les échos émanant de ces bidonvilles, qui se dressent comme de véritables ceintures de pauvreté autour des grandes métropoles, n’incitent guère à l’optimisme.
Les consignes gouvernementales de respecter les règles de confinement ne sont pas généralement respectées dans les rangs de populations poussées, par la pauvreté et la marginalisation, à la rébellion et à la non-soumission aux règles imposées du haut.
« C’est maintenant qu’ils se souviennent de nous ? Nous sommes déjà enterrés vivants dans ce bidonville » lance un habitant du township d’Alexandra d’où il peut regarder la nuit, les lumières fascinantes de Sandton (quartier financier de Johannesburg) sans oser s’y approcher car trop cher et trop surveillé.
Il s’agit de sentiments de frustration qui trouvent tous leurs éclats en cette période dure que traverse l’Afrique du Sud.
Les appels à transcender les rancœurs d’une réalité fâcheuse héritée de l’ère raciste et aggravées par les années de mauvaise gouvernance qui ont suivi la fin de l’apartheid, se multiplient.
Au-delà de leur sagesse, ces appels traduisent une autre crainte dans ce pays qui navigue dans des eaux très troubles. On craint que la tension sociale, qui germe depuis 1994 et qui a été entretenue tout au long du dernier quart de siècle par une injustice sociale devenue presque une règle, ne trouve en ces temps difficiles le terrain fertile pour exploser.
C’est ce qui fait que l’appel à l’unité revienne comme un leitmotiv dans toutes les sorties de Ramaphosa. C’est dans l’unité et seulement dans l’unité que l’Afrique du Sud peut dépasser l’épreuve actuelle, répète-t-il, laissant entendre que l’après Coronavirus est une autre histoire en Afrique du Sud comme partout dans le monde. (MAP)