Moody’s, dernière des trois grandes agences qui maintient toujours la note sud-africaine à un cran au-dessus du niveau spéculatif, devra déterminer si ce pays, le plus industrialisé du continent africain, préserve toujours les fondements d’une économie capable de générer de la croissance et offrir des opportunités aux investisseurs.
Dans l’actuel environnement d’incertitude qui enveloppe l’économie mondiale, les Sud-Africains ont été avertis que l’économie de leur pays devra s’enfoncer davantage dans la crise.
Ce n’est pas, certes, une chose nouvelle pour un pays qui se trouve déjà en récession suite à deux trimestres consécutifs de croissance négative à la fin de 2019. Il s’agit de la deuxième récession en moins de deux ans.
Toutefois, avec des déficits sociaux des plus inquiétants dont un chômage affectant officiellement environ 30 pc de la population active et une pauvreté touchant plus de la moitié de la population globale (environ 58 millions d’âmes), l’Afrique du Sud semble pratiquement au bord du naufrage.
Les analyses les plus optimistes s’attendent à une contraction allant jusqu'à -4 à -5 pc du Produit Intérieur Brut du pays durant les trimestres qui viennent.
Le lockdown total du pays pour trois semaines annoncé par le président Cyril Ramaphosa en raison de la pandémie du Coronavirus, devra aggraver davantage une situation largement fragilisée.
Conscient du coût de la crise du Coronavirus dans le contexte spécifique de son pays, Ramaphosa a expliqué, dans un discours télévisé à ses concitoyens, que la priorité pour son gouvernement est de sauver la vie des Sud-Africains. « Nous allons user de tous les moyens à notre disposition pour protéger notre peuple des impacts de cette pandémie », a-t-il dit.
Dans les rangs des économistes de la place financière de Johannesburg on plaide pour le réalisme. L’impact économique du Coronavirus sera beaucoup plus grave que les mises en garde lancées par les institutions financières, indique l’économiste Azar Jammine.
Nombreux sont les analystes qui estiment que les indicateurs incitent à dire que l’économie sud-africaine devra atteindre des niveaux de contraction jamais égalés depuis 1980.
Par ailleurs, une nouvelle dégradation de la note souveraine sud-africaine par Moody’s devra avoir l’effet d’un coup pour le moins grave pour une économie dont la notation souveraine avait déjà été dégradée au niveau spéculatif peu glorieux par Fitch et Standard & Poor’s
Techniquement, la dégradation de l’Afrique du Sud par Moody’s signifierait que les obligations sud-africaines seront éjectées de l’indice des obligations d’Etat mondiales. Cela précipitera la vente forcée de certaines obligations qui, compte tenu de la volatilité du marché, est susceptible de frapper durement le rand.
La monnaie sud-africaine subit déjà les affres de la récession et du Coronavirus. Mercredi, le dollar américain s’échangeait à 17,40 rands.
Les analystes ne s’attendent pas à une surprise de la part de Moody’s, qui a longtemps donner le bénéfice du doute au gouvernement sud-africain, en l’appelant à mettre en œuvre des réformes structurelles à même de corriger la trajectoire de l’économie.
En dépit des mises en garde répétitives, aucun pas n’a été entrepris dans ce sens. Et pour cause, les profondes divisions au sein du Congrès National Africain, qui dirige le pays depuis 1994. (MAP)
AO