Voici le texte intégral du message Royal, dont lecture a été donnée par le conseiller de SM le Roi, Abdellatif Menouni.
"Louange à Dieu. Prière et salut sur le Prophète, Sa famille et Ses compagnons.
Mesdames, Messieurs,.
Il Nous est agréable d’adresser ce message aux participantes et aux participants à ce Forum parlementaire sur la justice sociale, organisé par la Chambre des Conseillers, et réunissant les représentants d’institutions nationales et internationales de renom, et un groupe d’experts et d’acteurs de la société civile, d’économistes et de sociologues. Nous mesurons l’importance des efforts constants que vous déployez, selon la position et le domaine de compétence de chacun, en vue de développer la réflexion sur les questions de justice sociale.
L’organisation de ce forum dans le Royaume du Maroc par la Chambre des Conseillers ne devrait pas être considérée seulement comme une suite donnée à la Résolution de l’Assemblée générale des Nations Unies, faisant de ce jour de février de chaque année, l’occasion de célébrer la Journée mondiale de la justice sociale. Bien plus que cela, elle marque une pause renouvelée pour réfléchir, étudier et évaluer les réalisations du Maroc en faveur de la justice sociale. Car il s’agit d’un projet national, constituant l’un des chantiers majeurs appelés à s’étendre, avec la volonté divine, tout au long de Notre règne béni, et parfaitement en phase avec les aspirations de notre peuple, les attentes de nos citoyens et les valeurs de notre civilisation.
C’est pourquoi la réalisation de la justice sociale constitue une option stratégique pour notre pays, et un élément fondamental de Nos orientations politiques, économiques et sociales depuis Notre accession au Trône de Nos glorieux ancêtres.
Ce choix procède de l’intérêt que Nous portons prioritairement et en permanence au vécu quotidien social et économique de notre peuple, toutes catégories confondues, notamment celles souffrant de la pauvreté et de la précarité dans leurs différentes manifestations. Il participe aussi de notre conviction que la dignité humaine, la justice et l’équité, l’égalité des chances et la réalisation des conditions d’une vie décente pour toutes les franges de notre peuple fidèle relèvent chacune des droits de l’Homme fondamentaux. Elles constituent à ce titre l’essence même de Nos multiples initiatives et le fondement de Nos orientations stratégiques relatives aux politiques publiques, notamment celles que Nous adressons au gouvernement, au parlement et aux conseils des collectivités territoriales.
Cette vision humaine et réaliste à la fois, incarne, par exemple mais pas exclusivement, l’essence de l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH), dans ses première et deuxième éditions, ainsi que le programme de développement destiné aux populations du monde rural, surtout les catégories les plus démunies et les plus vulnérables, comme annoncé dans Notre dernier Discours à l’occasion de la Fête du Trône.
Dans la même vision s’inscrivent aussi l’initiative que Nous avons prise de charger le Conseil économique, social et environnemental, avec d'autres institutions importantes, de préparer un rapport sur le capital immatériel et l’adoption, auparavant, du Rapport du cinquantenaire sur les perspectives d’un développement humain durable et global pour toutes les catégories de notre peuple.
C’est dans le même esprit que Nous avons adopté une approche fondée sur les droits de l’Homme dans l’élaboration, au profit de nos provinces du sud, d’un modèle de développement, répondant à Notre préoccupation de base qui est de faire de ce modèle une expérience pionnière et une pratique efficiente pour la concrétisation de la justice sociale dans ses différentes dimensions, notamment dans sa portée territoriale.
Nous ne cessons de souligner dans Nos Discours et Nos Messages adressés aux différents forums nationaux et internationaux, le lien étroit qui existe entre le développement économique, la justice sociale et la cohésion sociale. Cela procède de Notre ferme conviction qu’il serait vain de réaliser des niveaux de développement économique significatifs en l’absence d’une action concertée et coordonnée, faite de politiques publiques efficaces et ciblées, elles-mêmes fondées sur la répartition des fruits de la croissance économique de manière juste et équitable entre les différentes catégories de nos populations. De même, l’effort d’investissement que déploie notre pays dans les grands projets structurants, ne sera probant qu’en s’appuyant sur l’investissement dans le capital humain.
Mesdames, Messieurs,.
Nous ne manquons pas, cinq années pratiquement après l’entrée en vigueur des dispositions de la Constitution de notre pays, de vous rappeler que le "caractère social" a été une option historique constante du régime de monarchie constitutionnelle de notre pays depuis 1962.
Il n’est donc pas étonnant que notre aspiration commune à la justice sociale que Je ne cesse d’incarner en joignant le geste à la parole, et qui a été exprimée sous différentes formes par de nombreuses catégories sociales et de multiples acteurs politiques et de la société civile, ait trouvé sa traduction claire et sans équivoque dans le préambule de la Constitution de notre pays, qui consacre le choix irrévocable du Royaume de développer une société solidaire où tous jouissent de la sécurité, de la liberté, de l’égalité des chances, du respect de leur dignité et de la justice sociale, dans le cadre du principe de corrélation entre les droits et les devoirs de la citoyenneté.
La consécration constitutionnelle de cette option ne devrait en aucune manière être perçue comme une simple déclaration générale des intentions constitutionnelles , mais plutôt comme un cadre référentiel et institutionnel global de ce que devraient réaliser les politiques publiques, sectorielles, territoriales et transversales, dans tous les domaines économiques, sociaux, culturels et environnementaux.
Ce qui démontre la profondeur et l’enracinement de la vision marocaine de la justice sociale, c’est la constitutionnalisation par le document normatif suprême du pays de tous les droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux fondamentaux, y compris les droits des catégories devant être ciblées en priorité au moyen de politiques publiques vouées à la réalisation de la justice sociale. Il s’agit notamment des enfants, des jeunes, des personnes en situation de handicap, et des autres catégories vulnérables mentionnées dans les différentes dispositions de la Constitution.
Afin de concrétiser cette orientation, notre Constitution ne s’est pas contentée de consacrer les droits précités, mais elle prévoit également les mécanismes et les principes à caractère contraignant, de sorte à en garantir l’effectivité.
Je me réfère plus particulièrement au principe d’égalité entre les hommes et les femmes en ce qui concerne les différents droits humains, à la prohibition de toutes les formes de discrimination et à l’engagement positif des pouvoirs publics à mobiliser tous les moyens nécessaires pour garantir aux citoyennes et aux citoyens la jouissance effective et sur un pied d’égalité des droits économiques et sociaux fondamentaux, ainsi que les devoirs. Je renvoie également au principe en vertu duquel tous supportent les charges publiques, chacun selon ses capacités et tous assument, solidairement et proportionnellement aux moyens en leur possession, les coûts nécessités par le développement du pays. J’évoque aussi la nécessité pour le parlement et le gouvernement de veiller à la préservation de l’équilibre des finances de l’Etat, la coopération et la solidarité en tant que principes propres à l’organisation régionale et territoriale, ainsi que l’engagement qui incombe constitutionnellement aux pouvoirs publics d’encourager la négociation collective et de conclure les conventions collectives de travail. Il faut aussi garder à l’esprit le rôle clé des mécanismes constitutionnels de la démocratie participative.
Mais pour donner corps à cette vision sociale, nous devrons faire face au défi d’apporter des réponses pratiques à l’interrogation suivante : Comment peut-on traduire concrètement les mécanismes, les principes et les engagements de nature constitutionnelle en lois et en politiques publiques propres à réaliser la justice sociale à laquelle nous aspirons tous ?
Toute réponse à cette question fondamentale, qui sera sans doute au cœur de votre réflexion commune pendant ce forum, devra intégrer deux données majeures :
Premièrement, le capital tiré de l’adhésion efficiente de notre pays au processus mondial conduit par les Nations Unies et leurs différents organes, notamment l’Organisation internationale du Travail pour renforcer les programmes de justice sociale et leurs soubassements conventionnels et déclaratifs dans le cadre du droit international humanitaire.
Deuxièmement, la nécessité de mettre à profit les expériences nationales avant-gardistes dédiées à la réalisation de la justice sociale et d’en inscrire les prémisses dans les référentiels des politiques publiques. En la matière, Je peux citer à titre indicatif et non exhaustif des expériences remarquables comme l’Initiative nationale pour le Développement humain, l’intégration de la mise en œuvre des Objectifs du Millénaire dans les différentes politiques publiques nationales, la programmation budgétaire axée sur l’approche genre, la Charte sociale élaborée par le Conseil économique, social et environnemental et le processus d’institutionnalisation du dialogue social en tant qu’acquis devant être préservé, mis en valeur et développé.
C’est dans la même logique que s’inscrivent la contribution efficiente de notre pays à l’effort international centré sur l’adoption du Plan de développement durable à l’horizon 2030 et la position constante observée par le Maroc au sein des forums internationaux en faveur de la solidarité internationale et de la coopération pour le développement, notamment à l’échelle du continent africain. Ce capital constitue un solide pilier pour notre apport efficient à l’élaboration et l’opérationnalisation, aux niveaux régional et international, des agendas de développement durable, de développement social et de justice sociale.
Mesdames, Messieurs,.
Les acquis engrangés grâce aux politiques nationales avant-gardistes que nous avons lancées, les nouvelles dispositions constitutionnelles et notre adhésion efficiente au système onusien de justice sociale, sont autant de facteurs qui nous habilitent aujourd’hui, du fait de l’arrivée à maturité de notre expérience nationale, à nous engager dans un processus participatif de construction d’un modèle marocain de justice sociale. Nous sommes aussi à même de relever les défis auxquels nous faisons face tels que la consolidation des piliers de la solidarité sociale, catégorielle, territoriale et environnementale et la mise à profit de la croissance économique au service de la justice et de la cohésion sociales. A cela s’ajoutent la garantie d’une convergence des politiques publiques sectorielles et territoriales vouées à la réalisation de la justice sociale et celle des politiques intégrées destinées à des catégories spécifiques comme les enfants, les jeunes, les personnes âgées et les handicapés, ainsi que la consolidation des acquis nationaux engrangés dans le domaine du dialogue social et l’exploitation des opportunités offertes par la nouvelle Constitution en matière de démocratie participative.
Mesdames, Messieurs,.
Nous saisissons cette occasion pour saluer la contribution de la Chambre des Conseillers au processus de construction du modèle précité, à travers l’organisation de ce forum, première initiative du genre à être prise à l’occasion d’une journée onusienne, à savoir la journée mondiale de la justice sociale.
Avec une efficacité optimale, la Chambre des Conseillers met à profit son statut constitutionnel et sa spécificité illustrée par la multiplicité des disciplines et des représentations territoriales, professionnelles et syndicales existant en son sein. Elle se prévaut également de son rôle de chambre reflétant avec précision les attentes des espaces territoriaux et celles des acteurs professionnels, syndicaux et de la société civile, pour lancer une dynamique de débat public, plurielle et participative, en vue de construire un modèle marocain de justice sociale axé sur la solidarité pluridimensionnelle.
Il est de Notre devoir de rappeler certaines conditions clés à observer pour garantir le succès de vos démarches et de vos débats. Il est, donc, indispensable de garder à l’esprit l’approche participative et celle centrée sur les droits de l’Homme dans l’élaboration du modèle marocain de justice sociale. Il convient aussi d’avoir constamment en vue les engagements énoncés dans la Constitution de notre pays et ceux qui nous incombent en vertu des conventions que notre pays a ratifiées et auxquelles il a adhéré, notamment celles liées aux droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux, aux droits de l’enfant et à ceux des personnes handicapées. Nous insistons également sur la nécessité d’avoir à l’esprit la transversalité de l’égalité des genres.
Le lancement de la réflexion et du débat publics sur l’élaboration d’un modèle marocain de justice sociale est une preuve formelle de la force de nos institutions constitutionnelles, du dynamisme de notre espace public national et sa capacité à intégrer les dynamiques de la société, la multiplicité des opinions qui s’y expriment et la diversité des intérêts des différentes catégories qui la composent. C’est un acquis précieux qui ne peut être apprécié à sa juste valeur qu’au regard des déchirements et des tensions que vivent de nombreuses sociétés autour de problématiques sociétales extrêmement sensibles.
Pour conclure, Nous tenons à exprimer nos vifs remerciements à tous les participants à ce forum, et plus particulièrement à ceux qui représentent les différentes institutions régionales et internationales et les experts étrangers. Nous leur souhaitons la bienvenue au Royaume du Maroc et apprécions leur réceptivité sincère à cette manifestation nationale et internationale dédiée au service de la justice sociale. A tous, Nos souhaits de plein succès.
Wassalamou alaikoum wa rahmatou Allahi wabarakatouh".